Le dossier de ce numéro prend place dans la continuité d’une réflexion engagée au sein du comité éditorial de la revue, à l’instigation notamment de Jean Haëntjens, sur les modèles urbains et leur diffusion à la fois accélérée et différenciée à l’échelle mondiale. Le dossier « Des laboratoires aux modèles » (n° 404, printemps 2017) proposait une approche centrée sur les relations entre Villes et États. Le dossier que nous consacrons aux villes du Golfe pose la question différemment. Car, d’un côté, ces villes constituent des références dans le monde arabe, où elles investissent et exportent leur vision urbaine, comme pour la future capitale égyptienne Capital Cairo. D’un autre côté, elles font appel à des concepteurs étrangers, non seulement pour réaliser des bâtiments iconiques comme le Louvre Abou Dhabi de Jean Nouvel, mais aussi pour développer des technologies nouvelles ou dessiner des espaces publics référencés à des modèles européens. C’est, par exemple, le cas de l’agence Architecture-Studio associée au paysagiste Michel Desvigne lauréate du concours international pour l’aménagement des espaces publics de la ville nouvelle de Lusail, située au nord de Doha, la capitale du Qatar. Ce choix traduit bien la quête de modèles urbains et paysagers susceptibles d’attirer de nouvelles populations en leur offrant un cadre de vie apaisant.
En tout cas, en France, c’est l’année des paysagistes. Le Grand Prix national de paysage 2018, décerné tous les deux ans, a été attribué à l’aménagement des quais de la rive gauche de la Seine à Rouen par les agences In situ paysage et urbanisme et Atelier Jacqueline Osty et associés, un projet porté conjointement par la Ville et la métropole de Rouen (nous y consacrerons un numéro hors-série à l’automne). Quant au Grand Prix de l’urbanisme, il est revenu pour la première fois à un collectif, l’agence TER composée des trois paysagistes, Henri Bava, Michel Hössler et Olivier Philippe. L’agence TER est très présente au niveau international, aux États-Unis, en Chine et en Europe. Preuve que son « urbanisme des milieux » trouve des échos partout dans le monde.
De son côté, notre invité, Olivier Mongin, analyse depuis longtemps la mondialisation, en particulier dans sa dimension d’urbanisation généralisée. Et nous force à réfléchir sur sa part de violence.