Marion Angelosanto
Disponible sur Arte
Au 32, avenue Jean-Jaurès, à Pantin, l’insalubrité croissante de l’immeuble préoccupe les copropriétaires, dont Marion Angelosanto, réalisatrice, qui fait le récit de la lutte acharnée pour maintenir sur pied leur logis. Un véritable « David contre Goliath » dans l’enfer de l’administration française. Dans le quartier prioritaire au titre de la politique de la ville (QPV) des Quatre-Chemins, le bâti est souvent vétuste, les commerces se succèdent sans se pérenniser, les rues sont animées : on n’y dort jamais. Il bénéficie régulièrement de programmes visant à « requalifier l’espace public », « désenclaver le quartier », « lutter contre l’habitat indigne » (1). Quelques signes laissaient entrevoir la dégradation avancée de l’immeuble, jusqu’à la réception d’un courrier du tribunal : « La commune de Pantin demande qu’un expert soit désigné pour examiner l’état de l’immeuble […], il soutient qu’il y a péril imminent et qu’il en résulte un danger pour la sécurité publique. » L’architecte missionné pour évaluer les travaux constate un taux de 100 % d’humidité et recommande un plan de redressement global de l’immeuble. « Pour sauver l’immeuble, il faut refaire tout l’immeuble », résume la réalisatrice.
Les copropriétaires démarrent par un geste symbolique : repeindre en rouge vif la porte cochère, pour signifier au quartier que le 32 se refait une santé. S’ensuit la remise en état des parties communes, et de longues négociations pour redresser les finances, étapes indispensables pour obtenir une subvention de la Soreqa, spécialiste de la rénovation d’immeubles dégradés. Le documentaire décrit sur un ton caustique et avec une grande minutie l’épuisement collectif de ces propriétaires face à l’inaction publique, dépassés par les charges qui s’accumulent : le dernier étage en ruine, les gouttières à changer intégralement, le plafond effondré d’un appartement et dont il faudra partager la facture, sans oublier les intrusions répétées et l’usage de l’immeuble comme un lieu de passe, apportant son lot de violences. Marion Angelosanto n’omet aucun détail, et c’est justement cette accumulation d’acronymes, de démarches et de procédures qui donne au spectateur la sensation de s’épuiser aussi dans un dédale administratif sans issue. Une saturation qui révèle la perversité du système qui entoure le logement insalubre en France.
Maider Darricau
Notes :
1/ Issus de la présentation du projet de renouvellement urbain, NPNRU (Nouveau programme de rénovation urbaine) Quatre-Chemins, Pantin, par Est-Ensemble et la Ville de Pantin.