Le Miroir Retour dans les banlieues françaises
Luc Bronner
Seuil, 2025, 208 pages, 20,50 euros
Grand reporter au journal Le Monde, Luc Bronner avait couvert les émeutes urbaines de 2005 et en avait tiré un ouvrage publié en 2010, La Loi du ghetto (Calmann-Lévy). Le constat qu’il dresse après celles de 2023 est encore plus pessimiste. Non seulement la situation des quartiers sensibles ne s’est pas améliorée, mais elle s’est bien souvent dégradée, et cela, malgré les politiques de maintien de l’ordre mises en œuvre par les gouvernements successifs. Son opinion est, en effet, de montrer en quoi les politiques, qualifiées de « sécuritaires » par l’auteur, n’ont guère évité un pourrissement de la situation entre 2005 et 2023. Elles n’ont permis ni d’enrayer la montée de l’islamisme radical dans les banlieues, ni de stopper la progression du narcotrafic. L’exploitation politique de la situation par la droite et l’extrême droite est également dénoncée.
De ce point de vue, il serait également opportun de pointer la responsabilité de la gauche républicaine qui semble, dans le même temps, avoir abandonné toute ambition politique pour ces quartiers qui lui ont pourtant été durant longtemps fidèles du point de vue électoral. Enfin, la politique de la ville qui est censée apporter les réponses aux difficultés que les habitants des quartiers inscrits dans la géo- graphie prioritaire connaissent. C’est sans doute sur ce point que le livre fera le plus débat. Incontestablement, la politique de la ville, menée par les vingt-trois ministres recensés par l’auteur, a produit des effets sur la transformation urbanistique et sociale des banlieues héritées de la poli- tique des grands ensembles. Malgré les réserves de la Cour des comptes, l’effort est pourtant bien réel. Il suffit pour s’en convaincre de mesurer l’investissement de l’État, notamment dans la rénovation urbaine via les PNRU (programmes nationaux pour la rénovation urbaine), et dans les cités éducatives (dont il n’est pas question dans le livre).
En conséquence, il paraît hâtif de conclure sur le fait « qu’au miroir des banlieues, la société française […] se prépare à basculer dans le camp des démocraties illibérales, ces sociétés d’ordre où les citoyens choisissent démocratiquement de réduire les libertés et les droits des plus fragiles ». Ne faut-il pas plutôt vouloir concilier l’ordre républicain et la justice sociale ?
Thibault Tellier





