Yemi Bamiro
Disponible jusqu’au 30 septembre 2024 sur www.arte.tv
« En milieu urbain, quand les gens veulent faire passer un message à leur communauté et au monde entier avec passion, vigueur et authenticité, ils se tournent vers la culture hip-hop. » Ces mots sont ceux de KRS-One, pionnier du rap américain, qui témoigne dans la série documentaire de Yemi Bamiro.
En quatre épisodes, celle-ci balaie plusieurs décennies de rap à l’aune de l’histoire des États-Unis, afin de montrer comment cette musique urbaine à la fois festive, subversive et revendicatrice a accompagné les moments charnières du pays.
On ne s’étonne pas de retrouver à la production l’éminent Chuck D, le maître de cérémonie de Public Enemy, qui, au début des années 1980, s’est imposé comme l’archétype du hip-hop militant avec des titres aussi évocateurs que Fight the Power.
C’est le même Chuck D qui sert ici de fil conducteur au docu en tant que principal témoin, aux côtés d’autres grands noms du genre tels que Eminem, Ice‑T, Melle Mel, Fat Joe, en plus d’historiens et d’activistes états-uniens.
Si le rap est né au début des années 1970 avec les block parties du Bronx, le tournant entre musique festive et support contestataire est pris en 1979, lorsque The Message de Grandmaster Flash commence à circuler de main en main dans les rues de New York. Véritable chronique de la pauvreté dans le ghetto, la chanson raconte les « vitres cassées partout », ceux « qui urinent dans les escaliers », les « camés dans l’allée armés d’une batte de baseball »…, avant de scander ce qui deviendra un hymne universel : « Don’t push me ‘cause I’m close to the edge/I’m trying not to lose my head » (« ne me pousse pas, car je suis au bord du gouffre/j’essaye de ne pas devenir fou »). Le succès est immédiat et la messe est dite : le rap apparaît comme le vecteur idéal pour faire passer des messages dans lesquels les populations défavorisées se reconnaissent sans réserve.
Dès lors, il va accompagner, commenter et documenter les évènements les plus marquants, comme les émeutes de 1992 à Los Angeles, l’ouragan Katrina, l’élection de Barak Obama, le meurtre de George Floyd, les manifestations suprémacistes sous la présidence Trump… Quelques joies, beaucoup de peines, mais un esprit de résilience intact à l’image de la chanson de Kendrick Lamar, devenue hymne du mouvement Black Lives Matter, qui scande avec optimisme : « We Gon’ Be Alright. »
Rodolphe Casso