Julien Paolini
À Vif Cinémas, en salle le 17 juillet 2024
De Tchao Pantin, de Claude Berri, aux Ripoux, de Claude Zidi, en passant par le récent Goutte d’Or, de Clément Cogitore, le quartier le plus populaire de Paris a régulièrement servi de décorum aux réalisateurs français pour y déployer leurs histoires de voyous, de flics et de came. Sans doute, d’abord, pour son caractère sulfureux et exceptionnellement cosmopolite, mais peut-être aussi de peur de le voir disparaître sous l’écrasante gentrification de la capitale.
Avec Karmapolice, c’est au tour de Julien Paolini, dont c’est le second long métrage, de livrer un récit noir à Château-Rouge. Le jeune cinéaste, qui y a vécu une quinzaine d’années, semble être notamment tombé amoureux de la rue Dejean, qu’il montre sous toutes les coutures : « C’est un studio de cinéma à ciel ouvert, qui reflète une vision de la France et de mon cinéma, celui de la multiculture. »
Dans ce polar urbain, Angelo (Syrus Shahidi) est un flic idéaliste qui tente de se remettre d’une bavure. En arrêt de travail, il emménage provisoirement en plein cœur de la Goutte‑d’Or avec sa compagne (Karidja Touré) et se retrouve rapidement envoûté par le charme du quartier. Très vite, il se lie d’amitié avec Poulet, zonard boiteux dont on ignore s’il est un bienfaiteur, un parasite ou un poète ; un personnage interprété par Alexis Manenti qui avait excellé en flic ultra-nerveux dans Les Misérables. On retourne également au casting Steve Tientcheu, qui avait endossé le rôle du « maire » dans le film de Ladj Ly et joue cette fois les caïds du quartier.
Julien Paolini nous sort aussi, de temps à autre, de la Goutte‑d’Or, à la faveur de séances de jogging nocturne d’Angelo, pour montrer crûment les alentours du nord de Paris où le crack sévit dans les délaissés urbains. Peu à peu, ce héros qui veut bien faire afin de rétablir son karma, se retrouve à aider les locaux tout en s’éloignant de sa vocation de policier, qu’il songe à abandonner. Mais alors qu’il semble se couper du monde extérieur, passant ses journées avec Poulet, ses collègues lui intiment de revenir et sa compagne de se ressaisir.
Karmapolice est un film imparfait et souvent bancal, mais il a le mérite d’être une photographie assez juste de ce qu’est encore la Goutte‑d’Or, avant qu’elle ne devienne une carte postale.
Rodolphe Casso