Faire je(u) égal. Penser les espaces à l’école pour inclure tous les enfants
Édith Maruéjouls
(Double Ponctuation, 2022, 140 pages, 16 euros)
La question de l’inclusivité dans les cours de récréation nourrit le débat dans les écoles de France. En parcourant le numéro spécial sur les Cours Oasis du CAUE 75, joint au présent numéro 427 de la revue Urbanisme, le lecteur pourra constater que cette thématique constitue l’un des grands axes de réflexion dans la transformation des espaces extérieurs des établissements scolaires, au même titre que la lutte contre les îlots de chaleur, la végétalisation, la biodiversité, la récupération des eaux de pluie…, et toute la nouvelle pédagogie qui en découle pour sensibiliser les élèves aux défis environnementaux de demain. À travers cette nouvelle approche, un défi social est aussi de mise : en finir avec les comportements genrés du partage d’une cour de récré. Pour résumer en un cliché : les garçons occuperaient par habitude la majorité de l’espace, particulièrement avec les jeux de ballon au centre de la cour, quand les filles seraient reléguées (repoussées ?) aux lisières. Ils seraient aussi plus souvent auteurs d’agressions envers les filles que l’inverse. Pourquoi ?
C’est précisément de ces questions que s’empare Édith Maruéjouls, docteure en géographie spécialisée dans les questions de genre et de mixité. Son nouvel ouvrage, Faire je(u) égal, fait là aussi état des inégalités de traitement dans ces espaces publics miniatures. « De manière générale, les filles sont 45 % à considérer qu’elles ont moins de droits que les garçons, alors que seulement 30 % des garçons pensent avoir moins de droits que les filles. (C’est encore plus fort à la préadolescence où filles et garçons affirment que les filles ont moins de droit : 65 % des filles et 72 % des garçons de 17 et 18 ans le disent. » L’autrice va plus loin : « Le premier impact du système de genre, c’est le sexisme et l’homophobie. » De la tenue vestimentaire comme motif d’agression à l’usage d’insultes appartenant au champ sémantique de la prostitution, les filles apparaissent exposées à une violence récurrente
En concertation avec des enfants et leurs équipes pédagogiques, l’autrice présente en fin d’ouvrage des pistes de changement possibles, témoignages à l’appui. La première d’entre elles ne surprendra personne : se débarrasser du ballon. Enfin, Édith Maruéjouls va jusqu’à aborder le sujet des toilettes à l’école, qu’elle qualifie – ô combien justement – d’impensé.
Rodolphe Casso