Élodie Degavre
(disponible en DVD)
Projeté au festival Close-Up, qui s’est tenu du 10 au 17 octobre 2023, La Vie en kit est un documentaire de la Belge Élodie Degavre, qui retrace le parcours de « trois vieux utopistes » désireux de « mettre les habitants au cœur de leur architecture ».
Chacun à sa manière, Lucien Kroll, Paul Petit et Jean Englebert ont imaginé « une maison de demain légère, pour préserver nos ressources ; économique, pour s’adresser à tous ; et évolutive, pour anticiper le futur ». Des concepts datant des années 1970 et qui entrent aujourd’hui en forte résonance avec nos enjeux de transition.
Le film évoque d’abord l’œuvre de Jean Englebert, qui conçoit des logements en capsules, capables de bouger au fur et à mesure de l’évolution de la famille. L’architecte va jusqu’à imaginer que l’on puisse emporter sa capsule en voyage pour l’installer sur une autre structure. On visite également, dans les Ardennes, un ensemble de maisons industrialisées en bois, construites selon le système Patze-Englebert. Un jeu de Meccano grandeur nature où l’habitant commandait et dessinait lui-même sa maison par tranche.
Avec Paul Petit, on revisite ses maisons standardisées en acier, comme celles érigées au Sart Saint-Nicolas, à Marcinelle, un quartier de Charleroi. L’architecte a fait ici de la concertation un préalable en invitant les habitants à participer à la conception, « alors qu’ils n’ont aucune connaissance théorique d’urbanisme ou d’architecture ». Les difficultés rencontrées sont plutôt venues de l’administration tant son lotissement affichait des conceptions déroutantes, aussi bien en termes d’esthétique que d’organisation au sol.
Quant à Lucien Kroll et sa femme Simone, qui ont formé un binôme inséparable, on revient avec eux sur la création en 1976 de la maison médicale de l’université de Louvain, surnommée « Mémé ». Conçue pour loger les étudiants en médecine, chaque « kot » est délimité par des cloisons que l’on peut déplacer à sa guise. Les étudiants ont été fortement impliqués : « Ils ont tout dessiné, moi j’étais tranquille ! », s’amuse Lucien Kroll. Et Simone Kroll de rappeler : « Il y avait une espérance en une autre vie, particulièrement chez les jeunes. […] Rien n’est à nous, tout est pour vous ; je trouve que c’est la plus belle phrase qu’une société puisse formuler. »
Rodolphe Casso