L’Ancrage politique
Jean-Louis Briquet et Laurent Godmer (dir.)
(Presses universitaires du Septentrion, 2022, 282 pages, 26 euros)
Les publications de science politique relatives aux échelons territoriaux (communes, intercommunalités, départements, régions) et à l’action publique locale (politiques publiques et services publics territorialisés) sont de plus en plus nombreuses et souvent issues de recherches au long cours, apportant à la fois aux citoyens et aux spécialistes des études de qualité. Cet ouvrage, sous la direction de Jean-Louis Briquet (directeur de recherches au CNRS, rattaché au Centre européen de sociologie et de science politique de l’université Paris 1) et de Laurent Godmer (maître de conférences à l’université Gustave Eiffel, chercheur au laboratoire Hannah Arendt), n’échappe pas à cette tendance, en rassemblant utilement des contributions d’horizons divers au sujet de l’ancrage territorial des acteurs politiques, qu’ils soient individuels ou collectifs.
Les chercheurs partent ici de l’hypothèse selon laquelle la « déterritorialisation » de la vie politique nationale, en France comme ailleurs, ne signifie pas forcément un « déracinement » du politique, mais davantage une déconnexion de plus en plus manifeste entre la politique locale, fortement ancrée (bien que touchée par une abstention croissante) et l’échelon national qui, malgré des tentatives de territorialisation de son action publique, semble de plus en plus éloigné des activités « de proximité ». Quarante ans après la première loi de décentralisation en France, cet ouvrage collectif vient donc à point nommé pour établir un bilan de l’ancrage territorial en politique, à travers les formes individuelles d’incarnation (première partie) et les instruments collectifs de l’ancrage (deuxième partie), qui, malgré une certaine fragilité, reste une donnée essentielle de la vie politique.
Ainsi peut-on lire des analyses sur certains parcours d’élus locaux (André Labarrère, maire de Pau de 1971 à 2006 ; Jean Arthuis, ancien élu « cumulard » de la Mayenne ; Dominique Estrosi-Sassone, adjointe au maire puis sénatrice de Nice ; Jean-Yves Le Drian, « menhir breton » de la vie politique locale, régionale et nationale), d’autres sur les « fiefs » qui symbolisent ce qu’est un bastion socialiste (Martine Aubry à Lille, depuis 2001) et communiste (Ivry-sur-Seine), ainsi que des études sur des territoires étrangers (Sicile, Sud-Liban, Costa Rica, Jaipur).
Damien Augias