« Les Parisiens » une obsession française
« Anatomie d’un déséquilibre »
Journaliste indépendant, collaborateur régulier du Monde et chroniqueur sur son blog à succès « L’interconnexion n’est plus assurée » (à propos des transports et déplacements), Olivier Razemon est l’auteur d’ouvrages bien connus, tous publiés chez le même éditeur (La Tentation du bitume, avec Éric Hamelin, 2012 ; Comment la France a tué ses villes, 2016 ; Chronique impatiente de la mobilité quotidienne, 2019) et que la revue Urbanisme a déjà chroniqués.
Dans son nouvel essai, il propose une enquête sur le poids de l’Ile-de-France et de la concentration parisienne dans les infrastructures et la richesse du pays, source de déséquilibres politiques, économiques, sociaux et culturels. Sujet majeur de l’aménagement du territoire depuis le fameux Paris et le désert français (1947) de Jean-François Gravier, ce thème de l’hypertrophie parisienne n’a rien d’original. L’intérêt de l’ouvrage d’Olivier Razemon est de le placer dans le contexte épidémique actuel, notamment à l’aune de la volonté d’un grand nombre de Parisiens de quitter la capitale pour gagner une meilleure « qualité de vie ».
« Il y a trop de monde en région parisienne », martèle l’auteur dans une forme de constat sans appel, considérant que les premières victimes de cette hyperdensité sont avant tout les 12 millions de Franciliens eux-mêmes. L’auteur de Comment la France a tué ses villes ramène cette problématique à celle de la dévitalisation des villes petites et moyennes, considérant que le projet politique du Grand Paris (à la fois la métropole et le super-métro) est davantage une menace pour la cohésion du territoire politique qu’un renforcement de « l’attractivité de la ville-monde ». C’est donc à un rééquilibrage du pays qu’appelle cet essai, en évitant les solutions en trompe‑l’œil (le télétravail des cadres), en renonçant au gigantisme et en réinvestissant de manière qualitative plutôt que quantitative dans les espaces publics de la région parisienne. On regrettera simplement que les voies et moyens politiques pour développer ce rééquilibrage ne sont pas vraiment explorés… Peut-être constitueront-ils le thème d’un prochain livre ? / Damien Augias
Olivier Razemon, Rue de l’échiquier, 2021
216 pages, 18 euros