Jérémie Périn
Gebeka Films
En l’an 2200, la Terre est devenue un « clapier à chômeur » à la mode cyberpunk, où les robots font l’objet d’une vindicte populaire grandissante (ils prennent le boulot des honnêtes travailleurs – ça vous rappelle quelque chose ?). À quelque 55 millions de kilomètres de là, sur Mars, la vie s’écoule paisiblement au sein de Noctis, colonie prospère protégée par un dôme artificiel dont les panneaux projettent un ciel plus bleu que celui de Californie. Mais cette quiétude va être bientôt chamboulée par la disparition d’une étudiante, Jun Chow, soupçonnée d’avoir réussi à « déplomber » un robot ; cet acte de piratage consiste à faire sauter les sécurités qui obligent les machines à obéir et les empêchent de nuire aux humains.
La détective privée Aline Ruby et son partenaire cyborg Carlos Rivera sont chargés de retrouver Jun, dont les actes pourraient provoquer une incontrôlable réaction en chaîne. En se basant sur les fameuses lois de la robotique théorisées par l’écrivain Isaac Asimov, qu’adviendrait-il si les machines retrouvaient leur libre arbitre en brisant les chaînes mentales qui les soumettent aux humains ? Se retourneraient-elles contre leurs maîtres ? Déclareraient-elles leur indépendance ? Personne sur Mars ne tient à le savoir…
Avec ce film d’animation extrêmement ambitieux, le réalisateur français Jérémie Périn imagine une version – semble-t-il – idyllique de la colonisation de la planète rouge. On s’y rend en prenant une navette, le Mars Express, comme on prend l’avion à Orly ou le train de nuit Paris-Perpignan. Une fois sur place, on est très loin de l’inhospitalité dépeinte dans d’autres films tels que Total Recall, Mission to Mars, Planète rouge, Ghosts of Mars, Seul sur Mars… Ici, Noctis est une capitale accueillante, gérée par des multinationales, extrêmement bien équipée, irriguée de canaux et dotée de zones pavillonnaires à la Wisteria Lane.
Traversé de nombreuses influences SF, dont la principale reste Ghost in the Shell et son duo femme flic-homme cyborg, Mars Express surprend par son univers foisonnant, qui propose plusieurs grilles de lecture grâce à un niveau de détails extrêmement généreux et une réalisation de toute beauté.
Rodolphe Casso
[Retrouvez le portfolio de Mars Express dans le n° 430 de la revue, mars-avril 2023.]