Moi Capitaine

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Moi Capitaine

 

Matteo Garrone
Pathé, actuellement en salle

Après avoir exposé les funestes rouages de la mafia napolitaine dans Gomorra (2008), le cinéaste italien Matteo Garrone se frotte à un autre drame national : la tragédie vécue par les migrants qui tentent de gagner l’Europe en passant par son pays.

Suivant deux adolescents sénégalais rêvant d’Occident, Moi Capitaine déroule par le menu le calvaire d’un voyage à travers l’Afrique et la Méditerranée qu’entreprennent chaque année des dizaines de milliers d’êtres humains.

Seydou et son cousin Moussa, 16 ans, partent ainsi de Dakar après avoir économisé pendant six mois. Les adultes les ont prévenus : gagner clandestinement l’Italie les expose à une mort probable. « Ceux qui sont partis forment un tas de cadavres », avertit même la mère de Seydou.

Mais les deux gamins n’en ont cure : ils croient en leur étoile. Retorse, celle-ci va les mener à travers le Sahara, dont le soleil n’épargne ni les femmes, ni les enfants, jusqu’au Niger. Là, ils seront jetés dans les mains de passeurs, de racketteurs, de mafieux, et connaîtront la soif, la torture, l’esclavage. L’horreur absolue, en somme.

Et encore, Garrone, en artiste avisé, prend soin de ne pas verser dans l’insoutenable… il sait que l’imagination du spectateur fera le reste du chemin. Sans oublier pour autant de capter la poésie de l’Afrique de l’Ouest à travers son urbanité, ses paysages naturels et ses musiques – la bande originale, exceptionnelle, est signée Andrea Farri. Le film sait aussi montrer comment la solidarité opère, et l’humanité ressurgit, dans l’enfer de l’exil.

Moi Capitaine est une manière salutaire d’accorder deux heures entières – aussi terrifiantes que passionnantes – à un sujet que les chaînes d’info ne peuvent souvent pas traiter en plus de trois minutes. Des convois d’humains parvenus sur l’île de Lampedusa, d’autres qui débarquent en plein été sur une plage au milieu des vacanciers, ou ces rafiots pleins comme des œufs qui s’abîment corps et âme…

Face à ces images tristement banales, le film de Matteo Garrone vient nous sortir de notre léthargie. L’occasion de rappeler que selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 2 000 personnes sont mortes en Méditerranée l’an passé, lors de traversées pour tenter de rejoindre l’Europe.

Rodolphe Casso

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