Pour les périphéries, c’est l’heure des choix
Saint Herblain, Loire Atlantique, France, July 5 2017, Aerial view on Atlantis shopping center

Les grands défis écologiques et territoriaux imposent de réinterroger les périphéries, ces espaces urbains qui ne sont ni la ville ni le rural, pour les engager dans les différentes voies possibles de leur avenir.

 

Cela fait long­temps que le terme de périphéries est tombé en désuétude et a même qua­si­ment dis­pa­ru du voca­bu­laire. Elles sont pour­tant bel et bien là, mais on ne vou­lait plus trop les voir ni sur­tout les assu­mer, ces périphéries qui ont accueilli mas­si­ve­ment le développement de nos villes depuis les Trente Glorieuses.

Par­tant du pos­tu­lat que la périphérie est une notion rela­tive (on est tou­jours la périphérie de quelque chose), il est clair que la catégorie « périphérie » n’est pas uni­voque. Périphérie par rap­port à quoi ?… par rap­port au centre ou à l’espace rural envi­ron­nant ? Cha­cun étant le centre du monde, la notion de périphérie est nécessairement rela­tive ou sub­jec­tive. Cer­taines « périphéries » sont d’ailleurs périphériques à plu­sieurs centres urbains (ce que l’Insee qua­li­fie d’espace mul­ti­po­la­risé 1, mais n’a plus comp­ta­bi­lisé depuis quinze ans; il y avait près de 4000 com­munes multipolarisées en 2010, à com­pa­rer aux 12 300 com­munes des « cou­ronnes des grands pôles urbains »).

Cer­tains espaces mor­pho­lo­gi­que­ment clas­sables comme « périphéries » sont même par­fois placés au cœur géographique d’espaces métropolitains majeurs : pre­nons l’exemple de l’immense zone com­mer­ciale de Plan de Cam­pagne entre Aix et Mar­seille, qui est au bary­centre de la Métropole Aix-Mar­seille-Pro­vence. Nous considérons ici comme périphérie tout ce qui n’est pas centre et qui n’est pas rural. Tout se com­plique dès lors qu’un centre peut être en périphérie d’un autre centre, ce qui est un cas fréquent dans les prin­ci­pales métropoles françaises, marquées par un poly­cen­trisme qui rompt la logique centre-périphérie.

Les indi­ca­teurs sta­tis­tiques glo­ba­li­sants, décrivant le contexte socio‑économique et ter­ri­to­rial des périphéries, sont pra­ti­que­ment tous situés entre ceux du rural et ceux des centres, comme s’il y avait un conti­nuum. Dans un monde où l’urbain est généralisé (selon l’expression de Françoise Choay), la notion même de centre et de périphérie peut paraître incon­grue. Elle est le corol­laire d’autres notions telles que ville-centre, pôle, aire d’attraction, aire urbaine fonc­tion­nelle, ban­lieue, périurbain, etc., que l’Insee nous pro­pose dans une lec­ture spa­tiale en « cou­ronnes emboîtées 2 » qui gomme beau­coup de réalités ter­ri­to­riales. Bref, la notion de périphérie est une catégorie trouble et mal outillée sta­tis­ti­que­ment. Elle est sur­tout très diverse intrinsèquement. En effet, qu’y a‑t-il de com­mun entre les lotis­se­ments pavillon­naires, les grands ensembles, les villes nou­velles, les zones d’activité économique, les centres com­mer­ciaux périphériques (on relèvera au pas­sage l’oxymore), etc. ?

Le résultat de cent ans d’urbanisme extensif

Le fac­teur com­mun des périphéries urbaines est qu’elles ont répondu aux besoins d’une génération mon­tante de classes moyennes dans une période de forte crois­sance économique et démographique. La « moder­ni­sa­tion » de la France s’est appuyée sur leur développement mas­sif et glo­ba­le­ment qua­li­ta­tif, certes poussé par des logiques économiques puis­santes, mais aus­si orga­nisé par la puis­sance publique.

Vincent Fou­chier

Vue aérienne du centre com­mer­cial Atlan­tis, à Saint-Her­blain (Loire-Atlan­tique). Pho­to : Alti­tude Drone/Shutterstock

1/Les « com­munes multipolarisées des grandes aires urbaines » sont les com­munes dont au moins 40 % des actifs occupés résidents tra­vaillent dans plu­sieurs grandes aires urbaines, sans atteindre ce seuil avec une seule d’entre elles, et qui forment avec elles un ensemble d’un seul tenant.

2/À noter que le seuil de 40% de navet­teurs (aires urbaines de l’Insee) a été complété par un seuil de 15 % (aires d ’attrac­tion de l ’Insee, aires urbaines fonc­tion­nelles de l’OCDE et d’Eurostat), indui­sant une vision plus exten­sive des périphéries dans leur rap­port à un centre.

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