La protection de la biodiversité passe, en ville aussi, par la création de réserves naturelles. Mode de classement, adoption d’un plan de gestion, gestion elle-même en sont les étapes clés. Avec un règlement, de la pédagogie et des animations que la proximité de la ville rend nécessaire et facilite. Les réserves naturelles urbaines s’intègrent et inspirent aussi un réseau plus large d’espaces naturels ou verts de la ville.
La France compte 359 réserves naturelles, dont 65 environ sont situées en périmètre urbain. L’association Réserves naturelles de France (RNF), qui anime ce réseau, ambitionne d’atteindre 500 réserves en 2030. Certains projets sont en ville, comme la future réserve naturelle régionale (RNR) de Niort (marais du Galuchet et boucles de la Sèvre), ou celles nationales (RNN) de La Palmyre (marais de Bréjat et baie de Bonne Anse), près de Royan, ou de la plaine d’Ansot, à Bayonne.
Parmi les motivations de départ de création d’une réserve, la valeur écologique est première. Il s’agit presque toujours de protéger des espèces : « 67 % des espèces protégées ou menacées sont présentes dans les réserves naturelles », selon RNF. La RNR de l’étang de Saint-Bonnet (51 ha, 1987 1), gérée par la communauté d’agglomération Porte de l’Isère (Capi) depuis 2007, abrite ainsi une centaine de cistudes d’Europe, des tortues protégées en France et en Europe. Les réserves protègent aussi, bien sûr, des habitats rares : milieux marins et côtiers, humides, arbustifs et herbacés, forestiers, rocheux. Par exemple, les RNN de l’île de Rohrschollen (310 ha, 1997), de la forêt de Neuhof-Illkirch-Graffenstaden (945 ha, 2012) et de la forêt de la Robertsau et de La Wantzenau (710 ha, 2020), situées en grande partie au nord de Strasbourg et gérées par la Ville pour le compte de l’État, représentent « une mesure de sauvegarde de la forêt alluviale rhénane relictuelle, mise à mal par les installations industrielles, les infrastructures et la canalisation du Rhin depuis le XIXe siècle, avant une prise de conscience écologique à partir des années 1970 », selon Marc Hoffsess, adjoint au maire de Strasbourg en charge de la transformation écologique. « Il s’agit de protéger, mais aussi de restaurer. »
Concertation, validation et plan de gestion obligatoire
En ville, plus qu’en secteur rural, la pression foncière, pesant lourdement sur certains milieux d’intérêt écologique, est à l’origine d’une mobilisation souvent associative pour sauvegarder ce qui peut encore l’être. C’est ainsi que la RNR de l’étang de Saint- Bonnet (Isère) constitue une forme de « mesure compensatoire » à l’extension urbaine. Tout commence par une concertation avec les propriétaires et riverains et une validation de l’intérêt scientifique. Puis vient la procédure de classement. Il faut alors choisir entre RNR et RNN. Après avis du conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN), une RNR est classée par le conseil régional, une RNN par l’État et par arrêté préfectoral. À Niort (Deux-Sèvres), Thibault Hébrard, adjoint à l’environnement de la Ville, estime qu’avec la RNR, « on peut avoir plus facilement la main sur la gestion de la réserve ».
Frédéric Ville
La réserve naturelle régionale de l’étang de Saint-Bonnet (Isère) a constitué, après coup, en 1987, une « mesure compensatoire » à la réalisation de la ville nouvelle de l ’Isle‑d ’Abeau à partir des années 1970, obtenue par des associations.
©Capi/Stéphane Nys/Air Tech Photo
Un commentaire
Préparchi
21 juin 2024 à 19h37
Cet article est une véritable bouffée d’air frais ! Il montre de manière convaincante comment la création de réserves naturelles en milieu urbain est non seulement possible, mais aussi essentielle. La perspective d’atteindre 500 réserves naturelles en 2030 est inspirante. Les exemples de Niort et de Royan illustrent bien l’impact positif que ces initiatives peuvent avoir. La mise en valeur des habitats rares et la protection des espèces menacées, comme à Strasbourg, sont des actions indispensables pour notre avenir. Merci à l’association Réserves naturelles de France et aux collectivités locales pour leur engagement. Cet article m’a vraiment convaincu de l’importance de soutenir et de promouvoir de telles initiatives dans nos villes