Le 1 % artistique pour changer de regard à travers l’art

Cette procédure spécifique de commande d’œuvres à des artistes, qui s’impose à l’État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales, soutient la création artistique depuis plus de soixante-dix ans. Mais le 1 % artistique, obligatoire, se heurte également à la méconnaissance de certains maîtres d’ouvrage. Explications avec Delphine Fournier, déléguée aux arts visuels au sein de la Direction générale de la création artistique du ministère de la Culture.

 

L’obligation de déco­ra­tion des construc­tions publiques, appe­lée le « 1 % artis­tique », existe depuis 1951. Quel est le prin­cipe de ce dis­po­si­tif et, soixante-treize ans après sa créa­tion, est-il tou­jours aus­si pertinent ?

Depuis sa créa­tion, le 1 % artis­tique pré­voit l’acquisition d’une œuvre d’art des­ti­née à être ins­tal­lée dans un bâti­ment public, pour un mon­tant d’1 % du coût hors taxes de la construc­tion, pla­fon­né à 2 mil­lions d’euros. Le maître d’ouvrage peut com­man­der ou ache­ter une œuvre exis­tante d’un artiste vivant.

Ini­tia­le­ment, il concer­nait les bâti­ments sco­laires, mais, au fil des années, le prin­cipe s’est élar­gi à d’autres com­man­di­taires et à d’autres construc­tions. Le 1 % artis­tique concerne aujourd’hui les bâti­ments sous maî­trise d’ouvrage de l’État, de ses éta­blis­se­ments publics (hors Epic [éta­blis­se­ment public à carac­tère indus­triel et com­mer­cial, ndlr] et éta­blis­se­ments hos­pi­ta­liers) et des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales, pour les construc­tions rela­tives à leurs compétences.

Les objec­tifs ini­tiaux du 1 % artis­tique étaient de sou­te­nir les artistes, de don­ner accès à la créa­tion artis­tique à tous, et notam­ment aux plus jeunes, en dehors des lieux spé­cia­li­sés, et d’enrichir le patri­moine de demain. Ces objec­tifs sont tou­jours d’actualité, le dis­po­si­tif est tou­jours effi­cace et sert plus que jamais à démo­cra­ti­ser l’art et la culture, par­tout sur le ter­ri­toire natio­nal. Le 1 % artis­tique per­met de sus­ci­ter la sur­prise, la réflexion, la dis­cus­sion des per­sonnes – quel que soit leur bagage cultu­rel – qui ren­contrent une œuvre issue du dispositif.

 

Le 1 % artis­tique nous est envié dans le monde entier. Plus de 12 500 pro­jets artis­tiques ont été menés en dehors des lieux dédiés à l’art. Au-delà de ce chiffre, quel bilan faites-vous du dis­po­si­tif ? Et quel type d’art a été le plus aidé via ce dispositif ?

D’autres pays ont eu des actions simi­laires, mais la France est le seul pays où l’action publique se pour­suit avec sta­bi­li­té et constance depuis soixante-dix ans. En 2011, le minis­tère de la Culture a confié à des his­to­riens de l’art l’étude de l’index des pro­jets émer­gés depuis le début via ce dis­po­si­tif. Ils ont noté que l’obligation du 1 % artis­tique avait per­mis de repré­sen­ter tous les cou­rants de la créa­tion contem­po­raine dans les construc­tions publiques.

Les com­man­di­taires font le plus sou­vent le choix d’œuvres en trois dimen­sions, et 20 % des pro­jets relèvent de la sculp­ture. Depuis 2005, les ins­tal­la­tions sont aus­si très sou­vent choi­sies pour inté­grer les construc­tions, qua­si­ment à éga­li­té avec la sculp­ture, sui­vies ensuite par la pein­ture et la pho­to­gra­phie. C’est un for­mi­dable outil de décou­verte et de dif­fu­sion de l’art de notre temps, dans sa diversité.

Les œuvres com­man­dées ou ache­tées au titre du 1 % doivent avoir une maté­ria­li­té qui tra­verse le temps et résiste aux aléas cli­ma­tiques. Elles doivent pou­voir être conser­vées dans un bâti­ment public accueillant quo­ti­dien­ne­ment un grand nombre de per­sonnes, bâti­ment qui n’a pas été conçu spé­ci­fi­que­ment pour elles – à la dif­fé­rence de ce qui peut exis­ter dans des musées, par exemple. Qui plus est, par une équipe qui n’est pas, la majo­ri­té du temps, spé­cia­liste de l’art.

 

Lucie Roma­no

 

Kiosque Le Fenouil de Mata­li Cras­set, au CHU d’Angers. Pho­to : Phi­lippe Piron

 

 

 

 

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