Geoffroy Boulard : « Positionner la Métropole du Grand Paris comme un acteur de référence »

Geoffroy Boulard, vice-président de la Métropole du Grand Paris, délégué à la communication, à l’innovation et au numérique, et maire du 17e arrondissement de Paris, présente les grands axes de déploiement de l’IA sur le territoire.

Com­ment orga­ni­sez-vous et sou­te­nez-vous le déploie­ment de l’intelligence arti­fi­cielle à l’échelle de la Métropole ?

La Métro­pole du Grand Paris, c’est 131 com­munes, 11 éta­blis­se­ments publics ter­ri­to­riaux, les 3 dépar­te­ments limi­trophes de Paris et quelques com­munes de l’Essonne et du Val‑d’Oise. Cela repré­sente 7,2 mil­lions d’habitants, sur les 12 mil­lions de la région Ile-de-France, et 25 % du PIB fran­çais concen­trés sur cette aire urbaine. Pour nous, l’innovation et le numé­rique sont des moteurs puis­sants de l’attractivité et du déve­lop­pe­ment du ter­ri­toire, mais aus­si de sa trans­for­ma­tion face aux enjeux actuels que sont la tran­si­tion éco­lo­gique, les sujets démo­gra­phiques et la tran­si­tion numé­rique – qui est une révolution.

La Métro­pole sou­tient tout d’abord la digi­ta­li­sa­tion des ser­vices publics et lutte contre la frac­ture numé­rique à tra­vers des pro­grammes d’inclusion. Concrè­te­ment, nous assis­tons les com­munes pour moder­ni­ser et inno­ver, pas uni­que­ment d’un point de vue tech­no­lo­gique. Dans ce cadre-là, nous opé­rons un pro­gramme inti­tu­lé Inno­ver dans la ville, qui est, là encore, dédié à l’accompagnement des com­munes pour notam­ment les aider à trou­ver des solu­tions tech­niques, tech­no­lo­giques, et des méthodes qui vont répondre à leurs enjeux locaux. Bien évi­dem­ment, nous avons consta­té que des « briques IA » étaient désor­mais inté­grées dans la majo­ri­té des pro­jets qui sont sou­mis au comi­té d’experts de Inno­ver dans la ville, mais aus­si dans le finan­ce­ment que l’on va appor­ter. Cet apport peut aller jusqu’à 200 000 euros, dans la limite de 50 % du mon­tant du pro­jet pro­po­sé par la com­mune, qui a le choix de son pres­ta­taire. Depuis deux ans, nous obser­vons très net­te­ment que les pro­jets ayant une com­po­sante IA sont majo­ri­taires. Ce qui signi­fie que les col­lec­ti­vi­tés s’approprient l’intelligence arti­fi­cielle au ser­vice de leurs com­munes, que ce soit en matière de mobi­li­té, de flux, d’habitat, de consom­ma­tion éner­gé­tique, de lutte contre les îlots de cha­leur… Les sujets sont très diver­si­fiés et tout va main­te­nant très vite.

Pour la Métro­pole, la feuille de route de l’IA à pro­pre­ment par­ler est d’assurer une meilleure appro­pria­tion et de lever les freins à son uti­li­sa­tion qui doit être, rap­pe­lons-le, régu­lée et maî­tri­sée. On ne rem­place pas les êtres humains.

Par exemple, dans le cas des chat­bots, voi­ce­bots et autres call­bots uti­li­sés par les com­munes qui veulent désa­tu­rer leur ser­vice accueil, l’objectif n’est pas de rem­pla­cer les per­sonnes de l’accueil, mais de per­mettre d’être davan­tage dans l’accompagnement humain des admi­nis­trés, d’être appuyé par un ser­vice d’IA qui offre plus de flui­di­té et de réac­ti­vi­té. Cepen­dant, la ques­tion n’est pas uni­que­ment de don­ner la pos­si­bi­li­té à toutes et tous de s’approprier l’IA sur le ter­ri­toire ; notre deuxième objec­tif est de posi­tion­ner la Métro­pole du Grand Paris, dans son ensemble vaste et hété­ro­gène, comme un acteur de réfé­rence en matière d’intelligence arti­fi­cielle au ser­vice des collectivités

Où en êtes-vous dans ce par­cours vers l’expertise ?

Depuis plu­sieurs années, à tra­vers des pro­grammes euro­péens, nous avons été sol­li­ci­tés pour par­ti­ci­per à des expé­ri­men­ta­tions avec des par­te­naires, et nous avons ain­si mobi­li­sé des com­munes sur le sujet. Notre volon­té est de conti­nuer ces phases de test, mais pas uni­que­ment avec des fonds de l’Europe.

Nous sommes, par exemple, lau­réats de la deuxième vague des pro­jets Démons­tra­teurs d’IA fru­gale au ser­vice de la tran­si­tion éco­lo­gique des ter­ri­toires (Diat), opé­ré par la Banque des Ter­ri­toires dans le cadre du pro­gramme France 2030, avec le pro­jet IA Eco-Pilot, qui porte sur les consom­ma­tions éner­gé­tiques des équi­pe­ments CVC [chauf­fage, ven­ti­la­tion et cli­ma­ti­sa­tion, ndlr] et des bâti­ments publics. Cette solu­tion mise au point avec nos par­te­naires advi­zeo et Tilt Ener­gy per­met une auto­ré­gu­la­tion grâce à des contrôles pré­dic­tifs s’appuyant sur des variables telles que la météo, les carac­té­ris­tiques du bâti­ment, etc. D’abord déve­lop­pée à petite échelle, une par­tie de ce pro­jet va main­te­nant être déployée pour toutes les com­munes qui le sou­haitent, sur la base du volon­ta­riat. Nous en atten­dons beaucoup.

« À Noi­sy-le-Grand, la socié­té Win­tics a déve­lop­pé une solu­tion d’analyse des flux vidéo des camé­ras ins­tal­lées dans les col­lec­ti­vi­tés pour pro­duire une large palette d’indicateurs sur dif­fé­rentes thé­ma­tiques, comme la détec­tion de dépôts sau­vages. » Cré­dit : Wintics

Com­ment appré­hen­dez-vous le besoin en infra­struc­tures que néces­site le déploie­ment de l’IA, comme les data cen­ters ?

Nous avons créé un réseau d’élus métro­po­li­tains pour les accul­tu­rer à tous les sujets d’innovation et du numé­rique. L’idée est d’aller, plu­sieurs fois par an, à la ren­contre des acteurs sur le ter­rain. Et, dans ce cadre, nous sommes notam­ment allés visi­ter le data cen­ter d’Interxion, situé à La Cour­neuve [répu­té le plus grand de France, avec une sur­face totale de 40 000 m²] pour mon­trer aus­si le lien impor­tant entre l’IA et les infra­struc­tures. Ce n’est pas notre sujet à pro­pre­ment par­ler dans nos pro­grammes d’innovation, mais cer­tains maires sont inquiets des pro­jets de
créa­tion de data cen­ters. C’est alors notre rôle d’expliquer, d’une part, que nous en avons besoin et, d’autre part, que ces centres de don­nées ne peuvent pas non plus se posi­tion­ner n’importe où ; une implan­ta­tion répond à des règles indus­trielles lourdes. Donc oui, il peut y avoir des réti­cences, car on les concentre sur les mêmes ter­ri­toires, et on aime­rait avoir une vision ter­ri­to­riale homo­gène, mais, encore une fois, des réa­li­tés indus­trielles et struc­tu­relles s’imposent.

Il existe aus­si des maires très volon­taires sur le sujet, comme ceux de Dugny et de Meu­don-la-Forêt – où un data cen­ter de la socié­té Equi­nix vient d’entrer en ser­vice. Pré­ci­sons que le centre aqua­tique olym­pique de Saint-Denis, construit par la Métro­pole du Grand Paris, est en par­tie chauf­fé par un data center.

Pro­pos recueillis par Rodolphe Casso

Lire la suite de cet article dans le numé­ro spé­cial 6 « Fabrique de la ville — La révo­lu­tion IA » en ver­sion papier ou en ver­sion numérique

Pho­to de cou­ver­ture : Jumeau numé­rique de la région métro­po­li­taine de Bar­ce­lone (détail). Cré­dit : Aretian

Pho­to : Geof­froy Bou­lard. Cré­dit D. R.

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