Le monstre qui sauva l’étang de Berre

Lauréat du prix de l’Audace artistique et culturelle, le projet Monstre y es-tu ? est labellisé Olympiade Culturelle. Il a créé une émulation en Provence, autour de l’étang de Berre… et son monstre. Jadis prisé par les locaux, il a perdu de sa superbe en raison d’une ère industrielle dévastatrice.
C’est par la littérature que le porteur de projet Karwan a choisi de remettre en lumière l’étang de Berre.

 

Le 27 sep­tembre 2023, la mai­rie de Vitrolles publie un étrange com­mu­ni­qué, relayé dès le len­de­main par La Pro­vence. Un habi­tant aurait signa­lé « une appa­ri­tion mys­té­rieuse » à proxi­mi­té de la base nau­tique de l’étang de Berre. On appelle à la vigilance.

Le 3 octobre, l’antenne locale de BFM TV dépêche une équipe sur place. Elle va ten­ter de cap­ter en direct la créa­ture en train de sor­tir des abysses. Le repor­tage est reten­tis­sant et cumule près de 700 000 vues sur les réseaux sociaux.

En quelques jours, ce ne sont pas moins de qua­rante articles qui paraissent dans la presse locale et natio­nale. Rapi­de­ment, les com­pa­rai­sons abondent avec le monstre du Loch Ness dans Midi Libre ou sur le média en ligne Demo­ti­va­teur. Mais qui est donc ce « Loch Berre » ?

Le 4 octobre, le por­teur de pro­jets cultu­rels Kar­wan dévoile le pot aux roses. En conni­vence avec les villes rive­raines, les médias et le Gipreb – le syn­di­cat mixte en charge de la pro­tec­tion de l’étang –, l’association a réus­si à créer un cli­mat d’intrigue et d’angoisse.

Kar­wan ne s’attendait pas à une telle mon­tée en puis­sance de la rumeur, qui ne consti­tuait qu’un point de départ, pré­cise Anne Guiot, sa direc­trice. « Le jeu avec les jour­na­listes était un pari d’une impor­tance moindre, si elle ne pre­nait pas, ça n’impactait pas le pro­jet. Désor­mais, la rumeur s’autonourrit. »

 

Res­tau­rer une image dégra­dée de l’étang de Berre grâce à la culture

L’étang de Berre était autre­fois un lieu de vil­lé­gia­ture. Il était pri­sé par toutes les classes sociales, raconte Nicole Jou­lia, élue délé­guée à la culture.

« La géné­ra­tion de mon grand-père, prin­ci­pa­le­ment mar­seillaise, venait au bord de l’étang le week-end et en vacances, c’était vrai­ment très attrac­tif. Il y avait ce côté caba­non­nier, avec de petits pied-à-terre en bois amé­na­gés som­mai­re­ment, où l’on venait pas­ser la jour­née en semaine. »

Cet attrait s’est pro­gres­si­ve­ment amoin­dri au pro­fit de la mer Médi­ter­ra­née en rai­son de la dégra­da­tion du milieu par le déver­se­ment des eaux de la cen­trale hydro­élec­trique de Saint-Cha­mas. Le mélange d’eaux douce et salée a conduit à un appau­vris­se­ment des milieux : algues, her­biers et espèces de pois­sons ont disparu.

Entre luxe bal­néaire et image indus­trielle, « l’étang porte ce mys­tère en son sein. D’un point de vue nar­ra­tif, c’est un bon cas d’école », ajoute Anne Guiot. Le Gipreb en assure donc la protection.

Mal­gré son éten­due, l’étang de Berre passe inaper­çu dans le dépar­te­ment, se désole son direc­teur Raphaël Gri­sel. « C’est une non-zone pour beau­coup d’habitants, ils sont inca­pables de le pla­cer sur une carte. »

Mai­der Darricau

 

Des­sin : « Il n’y a fina­le­ment pas de monstre dans l’é­tang de Berre… » © Charmag

 

 

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


À pro­pos

Depuis 1932, Urba­nisme est le creu­set d’une réflexion per­ma­nente et de dis­cus­sions fécondes sur les enjeux sociaux, cultu­rels, ter­ri­to­riaux de la pro­duc­tion urbaine. La revue a tra­ver­sé les époques en réaf­fir­mant constam­ment l’originalité de sa ligne édi­to­riale et la qua­li­té de ses conte­nus, par le dia­logue entre cher­cheurs, opé­ra­teurs et déci­deurs, avec des regards pluriels.


CONTACT

01 45 45 45 00


News­let­ter

Infor­ma­tions légales
Pour rece­voir nos news­let­ters. Confor­mé­ment à l’ar­ticle 27 de la loi du 6 jan­vier 1978 et du règle­ment (UE) 2016/679 du Par­le­ment euro­péen et du Conseil du 27 avril 2016, vous dis­po­sez d’un droit d’ac­cès, de rec­ti­fi­ca­tions et d’op­po­si­tion, en nous contac­tant. Pour toutes infor­ma­tions, vous pou­vez accé­der à la poli­tique de pro­tec­tion des don­nées.


Menus