Pendant cinq années, le projet Transfert a développé une offre culturelle ambitieuse dans la métropole nantaise. Il a contribué à requalifier une immense friche urbaine sur la rive sud de la Loire.
Mais, aujourd’hui, son héritage dans le futur quartier est questionné. Ainsi, c’est le rôle des activités culturelles dans la fabrique de la ville qui est regardé à la loupe.
C’est l’histoire d’un désert aux portes de Nantes où trois pionniers voulaient s’installer. Dans ces 12 hectares de concassé de béton, ils avaient cru déceler une source. Mirage ou pas, leur décision était prise, ce désert sans ombre deviendrait leur oasis. Ils y feraient fleurir la créativité, l’expérimentation et, peut-être, une cité.
L’histoire ressemble à un conte et c’est voulu. En réalité, les pionniers sont trois auteurs, Nicolas Reverdito, Sébastien Marqué et Carmen Beillevaire. Le premier est directeur de l’association Pick Up Production (PUP), les deux autres sont respectivement réalisateur et scénographe.
Tous les trois se sont associés en 2016 pour proposer un projet un peu fou à Nantes Métropole. Investir une friche industrielle pour y développer des activités culturelles et artistiques. Pour cela, ils inventent ce récit des pionniers, une fiction, comme pour jeter d’emblée leur regard d’artiste sur le lieu et combler son absence de narratifs et d’imaginaires.
Car, la parcelle qu’ils lorgnent est immense et complètement vide. Pas une vieille cabane, pas un arbuste, pas un centimètre d’ombre. Il n’y a rien que des cailloux. Il y avait bien les abattoirs – qui sont restés abandonnés une vingtaine d’années après leur fermeture en 1995 –, mais ils ont été détruits en 2016. Une table rase qui a alors ouvert le champ des possibles.
C’est là qu’est pressenti un nouveau quartier d’habitation. Le grand projet d’aménagement porté par la Métropole et la Ville de Rezé deviendra la ZAC Pirmil-Les Isles. La livraison est annoncée en 2037.
L’histoire urbaine nantaise
Projet majeur à l’échelle de l’agglomération, il s’agit d’un prolongement du vaste chantier de rénovation de l’Ile de Nantes juste en face, en cours depuis une vingtaine d’années. Il doit reprendre la main sur ce bout de terre déshérité, coincé entre les quatre voies de la route de Pornic, un centre commercial et les entrepôts du bord de Loire.
Au-delà de la quinzaine d’hectares du site des abattoirs, ce sont 58 hectares à reconquérir en tout. L’ambition est d’y faire venir le tramway, de revaloriser les bords de Loire et, bien sûr, d’y créer des logements.
« On est en train de construire la troisième étape de l’histoire urbaine nantaise », déclarait, en janvier 2019 dans la presse, Johanna Rolland, présidente de la Métropole et maire de Nantes. Mais, en attendant, que le projet se précise, les cailloux, eux, se languissent.
Baptisé « Transfert », le projet porté par Pick Up Production est « un peu plus qu’un débit de boissons », euphémise Nicolas Reverdito. Hybride et inclassable, il est défini comme une « zone libre d’art et de culture ».
David Attié
Vue aérienne du site de l’ancienne friche industrielle qui a accueilli le projet Transfert.
Photo : Jeremy Jehanin