En 2028, Bourges, la préfecture du Cher assurera le rôle de Capitale européenne de la culture. Une désignation obtenue à l’arraché grâce à une proposition sobre, aux antipodes des candidatures bling-bling des années 2000.
Analyse d’une victoire que personne n’avait vu venir.
Treize décembre 2023. Salle de réception du ministère de la Culture. Sous le regard de Rima Abdul Malak, ministre de l’époque, la présidente du jury, Rossella Tarantino, s’apprête à annoncer officiellement le nom de la Capitale européenne de la culture 2028.
Après quelques secondes de suspens, elle sort de l’enveloppe un carton sur lequel est écrit « Bourges » en très grosses lettres. À sa vue, la délégation berruyère éclate de joie. Même liesse à la mairie de la ville où quelques dizaines d’habitants sont rassemblés.
Tous fêtent le triomphe de David contre les trois Goliaths français encore en lice : Montpellier, Clermont-Ferrand et Rouen. Le maire de la préfecture du Cher, Yann Galut, fond en larmes. « La belle endormie est réveillée ! », lâche-t-il.
Tout a démarré juste après son élection. À l’époque, Bourges se repose un peu sur ses lauriers, pense le nouvel édile.
« Seule la culture pouvait relancer la ville. Et pour exister au niveau national, voire européen, il m’a semblé que concourir pour ce titre était la meilleure idée. Au départ, il s’agissait juste de participer à l’appel à projets. »
« Mais, petit à petit, on a pris conscience que les solides atouts de notre agglomération pouvaient vraiment nous faire gagner. C’est une “ville du quart d’heure”, à taille humaine, de proximité et de résilience. »
Petit Poucet de la compétition
Avec ses 65 000 habitants, Bourges fait figure de Petit Poucet de la compétition face à des métropoles à l’influence autrement plus importante.
« Notre candidature est très différente des précédentes villes, Lille, en 2004, et Marseille-Provence, en 2013, parce que l’époque est aussi très différente », assure Pascal Keiser, commissaire général de Bourges 2028.
« Notre projet “Territoires d’avenir” est plus mesuré en termes d’investissements. Avec ses 46 millions d’euros, c’est le plus petit budget parmi tous les concurrents en lice. Cette volonté de rester raisonnable fait sens pour nous. La dimension de notre projet correspond à celle de notre territoire. »
Mais, pas simple d’assumer ce discours, insiste-t-il. « Le plus souvent, il est inaudible face à la politique d’aménagement urbanistique centralisatrice portée en France jusque-là ; celle qui a privilégié les grosses métropoles. »
« Heureusement, les villes petites et moyennes apparaissent aujourd’hui comme potentiellement d’avenir. Notamment, elles offrent la possibilité de réinventer les rapports avec le vivre-ensemble et la nature. »
Yves Deloison
Photo : Jardins de l’abbaye de Noirlac. © Abbaye de Noirlac