Simon Teyssou, un architecte-urbaniste en campagne

Lauréat du Grand Prix de l’urbanisme 2023, Simon Teyssou, architecte-urbaniste multirécompensé, a choisi d’implanter son agence dans le Cantal. En privilégiant une démarche singulière en faveur des territoires ruraux et périurbains qui prend en compte l’environnement, il s’inscrit dans une démarche en prise avec les préoccupations actuelles. Reportage.

Quand on ne connaît pas le département du Can­tal, on ne com­prend pas pour­quoi l’agence de Simon Teys­sou s’appelle « Ate­lier du Rou­get ». Aucun rap­port avec le pois­son de roche. C’est plutôt du côté de la com­mune d’implantation qu’il faut cher­cher. Le Rou­get-Pers, 1 300 âmes, 600 mètres d’altitude, situé à vingt minutes en voi­ture au sud d’Aurillac. Plutôt rare qu’un bourg de si petite taille abrite une équipe d’architectes et d’urbanistes de renommée internationale.

Cité par­mi sept can­di­dats pour le Grand Prix natio­nal de l’urbanisme 2022, Simon Teys­sou est consacré l’année sui­vante dès le pre­mier tour. En 2023, l’agence avait déjà décroché deux trophées pour la réalisation du Centre cultu­rel et de loi­sirs du Rou­get, le Glo­bal Award for Sus­tai­nable Archi­tec­ture et le Prix natio­nal et régional de la Construc­tion Bois. En 2020, elle a obte­nu le Grand Prix d’Architectures 10+1 2020 pour la halle de Man­dailles-Saint-Julien, conçue sur le modèle d’une grange‑étable cantalienne.

Une agence hors du commun

Pour arri­ver jusqu’à l’agence située en pleine Châtaigneraie can­ta­lienne, on tra­verse un espace rural très différent de la zone vol­ca­nique située plus au nord. Sur la ligne de crête, entre bas­sins-ver­sants du Lot et de la Dor­dogne, le pla­teau gra­ni­tique bos­selé offre un pay­sage remembré et boisé. Une fois dans le bourg, on découvre un habi­tat très éloigné des vil­lages ruraux pit­to­resques du coin. Les espaces sont plus lâches. Les mai­sons datent de l’essor de la com­mune, conséquence de la construc­tion de la ligne de che­min de fer Figeac-Aurillac et de la gare, édifiée en 1868.

En plein cœur du bourg actuel, l’avenue du 15-sep­tembre-1945 possède un bâtiment hors-norme. À l’intérieur, les bureaux de l’agence de Simon Teys­sou. Dans les étages, deux loge­ments de 65 m² en loca­tion, afin de répondre à la demande de jeunes couples, familles mono­pa­ren­tales et célibataires. « Beau­coup sou­haitent res­ter sur le ter­ri­toire, mais ne trouvent pas à se loger », argu­mente le patron. Au deuxième et troisième étage de l’immeuble, l’architecte et sa famille ont inves­ti un duplex avec toit-ter­rasse qui domine le pay­sage au loin. La construc­tion de cet édifice met en pra­tique les prin­cipes cli­ma­tiques et ther­miques simples : hiérarchie des per­ce­ments, rez-de-jar­din enterré au nord, com­pa­cité et densité.

L’inertie des masses en béton et chapes en ciment opti­mise le confort ther­mique de l’ensemble. Entièrement vitrée pour cap­ter le rayon­ne­ment solaire, la façade sud se dédouble pour créer des inter­stices, conver­tis en espaces intermédiaires privilégiés. Un système de pro­tec­tion solaire activé grâce à de grands volets en acier Cor­ten – à cor­ro­sion super­fi­cielle provoquée par les condi­tions atmosphériques – filtre les rayons. « On est qua­si­ment pas­sif sur cette par­tie, explique l’architecte. Nous sommes début février et depuis une semaine, il n’y a pas de chauf­fage allumé. »

À l’extérieur, une cuve de récupération des eaux ali­mente sani­taires et machines à laver. Une autre cuve à granulés de bois four­nit la chaudière col­lec­tive partagée avec deux mai­sons de ville situées à proxi­mité. Sur la par­celle pour­tant minus­cule, Simon Teys­sou a aus­si tenu à res­ti­tuer un mor­ceau à la col­lec­ti­vité en créant un pas­sage public entre les deux rues. « J’ai construit cet immeuble en 2010–2011, dix ans après avoir créé l’agence à Cler­mont-Fer­rand. Ensuite, nous avons déménagé dans un local voi­sin où nous sommes installés aujourd’hui au Rou­get, vite deve­nu trop petit. J’ai demandé au maire de l’époque si des ter­rains construc­tibles étaient à vendre. Il m’a spontanément pro­posé une par­celle dans la zone d’activité, en bord de la natio­nale. Je ne vou­lais sur­tout pas ce type d’environnement ! »

À l’opposé, le pro­jet de Simon Teys­sou est de res­ter en centre-bourg afin que tout déplacement puisse se faire à pied. « L’avantage pour la com­mune, c’est l’animation que les activités de l’agence peuvent pro­duire, puisque les salariés fréquentent entre autres, cafés, res­tau­rants et com­merces, ce qui sti­mule l’économie locale. »

Simon Teys­sou et un col­la­bo­ra­teur à l’atelier.

© Benoit Alazard

Yves Deloi­son

Lire la suite de cet article

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


À pro­pos

Depuis 1932, Urba­nisme est le creu­set d’une réflexion per­ma­nente et de dis­cus­sions fécondes sur les enjeux sociaux, cultu­rels, ter­ri­to­riaux de la pro­duc­tion urbaine. La revue a tra­ver­sé les époques en réaf­fir­mant constam­ment l’originalité de sa ligne édi­to­riale et la qua­li­té de ses conte­nus, par le dia­logue entre cher­cheurs, opé­ra­teurs et déci­deurs, avec des regards pluriels.


CONTACT

01 45 45 45 00


News­let­ter

Infor­ma­tions légales
Pour rece­voir nos news­let­ters. Confor­mé­ment à l’ar­ticle 27 de la loi du 6 jan­vier 1978 et du règle­ment (UE) 2016/679 du Par­le­ment euro­péen et du Conseil du 27 avril 2016, vous dis­po­sez d’un droit d’ac­cès, de rec­ti­fi­ca­tions et d’op­po­si­tion, en nous contac­tant. Pour toutes infor­ma­tions, vous pou­vez accé­der à la poli­tique de pro­tec­tion des don­nées.


Menus