No cultures, no futures

« Le futur appartient à celui
qui a la plus longue mémoire »

 

C’est à un appel en forme d’injonction auquel ont répon­du les par­ti­ci­pants de la 44e Ren­contre natio­nale des agences d’urbanisme : « Pas de réorien­ta­tion éco­lo­gique sans recom­po­si­tion cultu­relle des ter­ri­toires », du 15 au 17 novembre der­nier, à Clermont-Ferrand.
Un appel qui rap­pelle les slo­gans pro­vo­ca­teurs des mou­ve­ments cultu­rels radi­caux – des situa­tion­nistes aux punks, en pas­sant par les divers col­lec­tifs de Mai 68 –, dont il par­tage la dimen­sion sou­vent para­doxale, sinon oxy­mo­rale ¹. Car la culture ne désigne-t-elle pas, en phi­lo­so­phie, ce qui est oppo­sé à la nature ? N’est-elle pas une forme d’accrétion his­to­rique, cou­tu­mière, socio­lo­gique, lan­ga­gière, artis­tique…, propre à un groupe d’individus et, de ce fait, dif­fi­ci­le­ment « recomposable » ?
Les nom­breux par­ti­ci­pants ont rapi­de­ment com­pris qu’il serait ques­tion tout au long de l’évènement de la culture au sens éty­mo­lo­gique du terme – issu du latin cultu­ra –, c’est-à-dire habi­ter, culti­ver, ou honorer.

Une accep­tion qui a, assu­ré­ment, pris un sens pro­fond, une vigueur par­ti­cu­lière, à Cler­mont-Fer­rand, en Auvergne, au cœur du Mas­sif cen­tral, dans cette région vol­ca­nique, ter­rienne, indus­trielle, à l’histoire et à l’identité puis­santes, enno­blies par les vic­toires contre l’adversité. De Ger­go­vie au stade Michelin.
Il y a, sans aucun doute, une culture auver­gnate et cler­mon­toise, fon­dée par son agri­cul­ture, ses croyances et ses tra­di­tions, son patri­moine, son état d’esprit construits len­te­ment, au fil des siècles et d’une his­toire. Une culture qui est une dyna­mique de trans­for­ma­tion des condi­tions de vie humaines et qui, ici, n’a jamais écar­té la consi­dé­ra­tion pour la nature – ancrée dans les richesses envi­ron­ne­men­tales des puys –, tout en par­ti­ci­pant acti­ve­ment à l’avènement anthro­po­cène par le déve­lop­pe­ment indus­triel et urbain.

Car c’est bien de l’urgence cli­ma­tique et envi­ron­ne­men­tale dont il a été ques­tion durant cette ren­contre, et de l’absolue néces­si­té de réagir rapi­de­ment en pre­nant des mesures signi­fi­ca­tives de réorien­ta­tion (dans nos modes de vie, de dépla­ce­ment, de consom­ma­tion…), ain­si que des résis­tances et des blo­cages qu’elles rencontrent.
Cela consti­tue une rup­ture néces­saire dans le rythme lent, his­to­rique, de l’adaptation des acti­vi­tés humaines, qui ne pour­ra être pos­sible qu’à la condi­tion d’une recom­po­si­tion cultu­relle de laquelle doivent émer­ger « de nou­velles pen­sées, de nou­veaux savoirs, de nou­veaux récits, de nou­veaux ima­gi­naires, de nou­velles sen­si­bi­li­tés […]. D’aucuns n’hésitent pas à par­ler de véri­table Renais­sance ² ».

Per­sonne n’ignore le rôle déter­mi­nant qu’ont joué l’art et les artistes à la Renais­sance, com­ment ils ont su pro­je­ter les socié­tés toutes entières dans un nou­veau modèle. Et, comme alors, la bifur­ca­tion ne sau­rait se faire sans ce capi­tal et ce génie humain, notam­ment loca­le­ment, qui recèlent des clés de l’avenir. Comme l’a très jus­te­ment expri­mé Frie­drich Nietzsche dans sa célèbre for­mule : « Le futur appar­tient à celui qui a la plus longue mémoire. »

Julien Mey­ri­gnac

 

1/« Ne tra­vaillez jamais », « Il est inter­dit d’interdire », « No future ».
2/Extrait du pro­gramme de la rencontre.

 

(Pho­to de cou­ver­ture : Gala d’ouverture, sur la piste de danse. Pho­to : Félix de Malleraix).

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