Face aux défis climatiques et sociétaux, les jeunes urbanistes empruntent des voies en apparence divergentes pour imaginer et concevoir la ville de demain. Entre dévotion techniciste et nouveaux engagements communautaires, certains commencent à envisager des compromis.
Lorsqu’on interroge les étudiants et jeunes professionnels intéressés – au sens large – par le développement des villes et des territoires, deux courants se dégagent. Certains, sans trop spéculer sur la notion déjà presque épuisée de smart city, capitalisent sur le digital et les outils numériques au service d’une ville plus constituée (dense), mieux organisée (optimisée), en un mot : performante. Au contraire, d’autres envisagent l’avenir des villes sous l’angle de l’informalité et de la frugalité, plus diverse (juste) et plus complexe (libre), en synthèse : plus humaine. Des points de vue et engagements inconciliables ? Rien n’est moins sûr.
Quand on évoque avec des urbageeks les solutions digitales au service de la planification territoriale, de la conception urbaine et de l’augmentation des services urbains, toujours plus nombreuses et plus puissantes, ces derniers manifestent un enthousiasme débordant et communicatif. S’ils ne sont pas majoritaires, il faut reconnaître qu’un mouvement de fond anime les professionnels de l’urbanisme, de l’aménagement, de la construction et de la gestion urbaine autour de l’exploitation et la valorisation du big data.
L’empire des « App » (applications) étend peu à peu ses frontières, investissant progressivement tous les domaines. À commencer par celui de la planification territoriale qui bascule doucement des approches projectives old school – toutes en scénarios sociodémographiques – vers des mises en situation globales et réalistes qui lorgnent vers le célèbre jeu vidéo SimCity.
Tech is good for you!
Prenez la plateforme dédiée à la planification territoriale Urban Footprint, développée aux États-Unis par la société d’ingénierie et de conseil Aecom, qui se présente comme « la première plateforme d’intelligence urbaine au monde » et promet ni plus ni moins de « mieux planifier, pour mieux investir et mieux s’adapter ».
En agrégeant le big data au service de l’aide à la décision, Urban Footprint ne se contente pas de produire des états des lieux de contextes territoriaux et urbains, elle délivre des scénarios qui sont paramétrables en fonction du profil de l’utilisateur (collectivité, concepteur, investisseur…). Ces scénarios sont bien moins établis au prisme des besoins des territoires que des risques de toutes natures : risques naturels, risques communautaires, risques financiers. Vertigineux pour des professionnels européens, car très précis et ergonomique, mais aussi parce qu’en apparence très éloigné de l’intérêt général. Jamais le territoire n’avait été mis en pareille équation capitaliste.
Mais les App s’intéressent aussi de très près au développement urbain et à la conception urbaine et architecturale. En France, plusieurs applications, comme Buildrz, proposent un accompagnement complet du développement immobilier résidentiel en réalisant une veille sur les disponibilités foncières, mais surtout en proposant instantanément des simulations capacitaires envisageables des terrains identifiés et de leur valorisation possible.
La spécificité de Buildrz serait « son caractère collaboratif » grâce à « la mutualisation des données des collectivités, opérateurs et concepteurs » ; une promesse qui laisse songeur. L’application promet également « la plus haute qualité architecturale et environnementale » en fonction des objectifs de chaque opérateur.
Photo : © jamesteohart/Shutterstock
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