En comparant les politiques de sobriété foncière menées en Allemagne, en Belgique, en Espagne et en Italie, la Fédération nationale des agences d’urbanisme (Fnau), avec l’appui d’étudiants de Sciences-Po, a constaté une grande disparité des approches et des actions. Tour d’horizon du « no net land take » (NNLT).
À l’heure où les enjeux de sobriété foncière invitent à transformer en profondeur les documents de planification, les modèles d’aménagement et les manières de faire du projet urbain, il est instructif, pour resituer nos débats hexagonaux sur le ZAN, d’ouvrir une vision à 360° sur les politiques menées par nos pays voisins sur cet objectif européen du « no net land take » ou « zéro artificialisation nette » (ZAN) en 2050, énoncé en 2011 dans la feuille de route pour une Europe efficace en ressources. C’est ce que la Fnau s’est attachée à faire dans un benchmark, réalisé avec un groupe d’étudiants de Sciences-Po Paris, sur les cadres et les leviers pour la sobriété foncière mobilisés dans plusieurs pays européens, notamment en Allemagne, Belgique, Espagne et Italie.
La feuille de route européenne de 2011 ne comporte pas d’obligation pour les États membres et l’objectif du « no net land take » (NNLT) a seulement un statut de recommandation. L’équation de l’objectif de sobriété foncière et les débats autour de cette question se posent dans tous les pays d’Europe, mais les terminologies, les cadres législatifs ou de financement, comme les outils de suivi se révèlent très différents d’un pays à l’autre.
À l’échelle du continent européen, les géodonnées les plus fines sont celles de CORINE Land Cover publiées tous les six ans depuis 2000; le prochain millésime paraîtra en 2024. Pour les périodes 2000–2006-2012, l’artificialisation des sols dans ces cinq pays (incluant la France) a représenté plus de la moitié de celle de l’ensemble de l’Europe.
On constate cependant, depuis 2012, une réduction significative de l’artificialisation des sols dans ces 5 pays. Parmi eux, l’Espagne a connu l’artificialisation la plus élevée entre 2000 et 2012. Bien que peu de politiques de réduction de la consommation aient été mises en place, à l’exception de certains territoires comme Vitoria-Gasteiz en Pays basque espagnol, l’urbanisation espagnole a fortement chuté depuis 2012 du fait de la crise économique. La Belgique, déjà très densément urbanisée à plus de 20 %, a, en revanche, très peu consommé de sols.
Le levier législatif apparaît incontournable pour la lutte contre l’artificialisation des sols. Des cinq pays étudiés, la France, de culture centralisée, est le seul pays à avoir une loi nationale et fixé une trajectoire de réduction de l’artificialisation contraignante. Dans les quatre autres pays, de structure fédérale, la législation du NNLT relève davantage de l’échelle régionale. Au sein d’un même pays, les politiques de sobriété foncière peuvent donc être très disparates d’une région à l’autre.
En Émilie-Romagne, le 3 % maximum d’artificialisation et les contrats de régénération urbaine
En Italie, la gestion de la consommation des sols relève des compétences d’aménagement du territoire des régions, conférant à chacune une grande autonomie dans la gestion des sols. L’absence d’une législation nationale cohérente pour réguler l’artificialisation des sols aboutit ainsi à une disparité des politiques et des outils mise en œuvre. Peu de régions ont réellement mis en place des politiques volontaristes de limitation de la consommation des sols. Parmi les régions italiennes, trois se démarquent en tant qu’exemples de préservation des sols: le Val d’Aoste, le Trentin-Haut-Adige et la Sardaigne, qui ont su maintenir un équilibre entre développement urbain et préservation de l’environnement.
Brigitte Bariol-Mathais.
© 2023, Landsat/Copernicus, Data SIO, NOAA, U.S. Navy, NGA, GEBCO, IBCAO, U.S. Geological Survey. Données cartographiques © 2023, Google