LES FESTIVALS MUSICAUX, NOUVEAUX MARQUEURS TERRITORIAUX
BARCELONA - MAY 30: People from the audience watching a concert at Heineken Primavera Sound 2014 Festival (PS14) on May 30, 2014 in Barcelona, Spain.

Évè­ne­ments rares à la fin du xxe siècle, les fes­ti­vals musi­caux ont défer­lé sur la France et le monde au béné­fice des nou­velles logiques éco­no­miques de l’industrie musi­cale. Cer­tains ter­ri­toires et acteurs ont sau­té sur cette oppor­tu­ni­té pour assu­rer leur pro­mo­tion et enclen­cher de nou­velles dyna­miques éco­no­miques et sociales.

Il y a un demi-siècle, la contre-culture mon­dia­li­sée orga­ni­sait dans des lieux aus­si ins­pi­rants qu’éloignés des grandes villes (on ne par­lait pas encore vrai­ment de métro­poles) réac­tion­naires, de grands ras­sem­ble­ments qui réunis­saient bien au-delà des artistes et groupes musi­caux de la « pop culture », toutes les expres­sions des reven­di­ca­tions sociales et poli­tiques de l’époque. À Mon­te­rey, Wight, Wood­stock…, mais aus­si au cir­cuit du Cas­tel­let ou sur le pla­teau du Lar­zac, une jeu­nesse qua­li­fiée alors de « hip­pie » conver­geait pour assis­ter aux concerts de Jimi Hen­drix, Janis Joplin ou Mag­ma, entre les­quels écri­vains et poètes – comme Bur­roughs ou Gins­berg –, acti­vistes révo­lu­tion­naires et repré­sen­tants des reli­gions extrême-orien­tales, pre­naient la parole en faveur d’un monde meilleur.

La dimen­sion plu­ri­dis­ci­pli­naire et enga­gée de ces pre­miers grands ras­sem­ble­ments1 demeure dans l’ADN des grands fes­ti­vals actuels. Par­fois comme simple élé­ment de lan­gage mar­ke­ting pour les fes­ti­vals ouver­te­ment mer­can­tiles, comme Coa­chel­la (« Val­ley Music and Arts Fes­ti­val », une pro­messe balayée par une orga­ni­sa­tion très dépen­dante des majors de l’industrie musi­cale). Ou, de toute évi­dence, de manière bien plus sin­cère, pour de grands fes­ti­vals fran­çais. On pense évi­dem­ment aux Soli­days, orga­ni­sés par l’association Soli­da­ri­té Sida depuis 1999, dont les béné­fices per­mettent de finan­cer des pro­grammes de pré­ven­tion et d’aide aux malades du Sida dans 21 pays, et qui pro­pose, en plus des concerts, de nom­breuses confé­rences et ren­contres mili­tantes. Ou bien encore à We Love Green, qui, depuis une dizaine d’années, pro­pose des espaces d’expression et de ren­contre à des asso­cia­tions enga­gées dans la pro­tec­tion de l’environnement. Deux grands fes­ti­vals « pari­siens » orga­ni­sés à l’hippodrome de Long­champ et au bois de Vincennes.

Pour ce qui concerne les lieux d’organisation, la tra­di­tion « ter­ri­toire du loin­tain » – des grands espaces de cam­pagne – est entre­te­nue par les fameux méga fes­ti­vals bri­tan­niques (Rea­ding, Glas­ton­bu­ry…) et par d’autres, alors même qu’ils sont deve­nus extrê­me­ment connus, comme les Vieilles Char­rues à Carhaix, par exemple. Mais la plu­part des fes­ti­vals ont lieu à l’intérieur ou à la péri­phé­rie immé­diate des villes : en plein centre-ville, pour le fes­ti­val de Nîmes (dans les arènes), le Nice Jazz Fes­ti­val (place Mas­se­na), ou le Main Square à Arras (cita­delle) ; dans de grands parcs péri­ur­bains, pour Rock en Seine (domaine de Saint-Cloud) ou les Euro­ckéennes (presqu’île du Mal­sau­cy) et dans des friches urbaines pour Mar­sa­tac (Belle de Mai) ou la Fête de l’Huma (base aérienne 217).

Mais si, pen­dant les pre­mières décen­nies, les fes­ti­vals étaient avant tout une ques­tion de demande locale (avec des ini­tia­tives le plus sou­vent por­tées par des pas­sion­nés) et de capa­ci­té ter­ri­to­riale (lieux appro­priés), une tout autre dyna­mique est à l’œuvre depuis le milieu des années 2000.

Julien Mey­ri­gnac

Cré­dit pho­to : Pri­ma­ve­ra Sound Fes­ti­val, à Bar­ce­lone     Pho­to : Chris­tian Ber­trand / Shutterstock

Lire la suite dans le numéro 426

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