Les villes nouvelles en région parisienne, un nouveau récit urbain ?
Place piétonne dans la ville nouvelle. Saint-Quentin-en-Yvelines (Yvelines), années 1970.

Présenté comme le nou­vel art de vivre urbain de la France gaul­lienne, le concept de villes nou­velles, asso­cié au mythe de la création ori­gi­nelle, pro­met­tait inno­va­tions sociales et archi­tec­tu­rales. Il a sur­tout brillé par la com­mu­ni­ca­tion nova­trice des opérateurs et des pou­voirs publics et n’a pas échappé à la crise urbaine, qui ne cesse de se développer depuis les années 1990.

Le modèle des villes nou­velles, affiché comme une rup­ture avec le précédent, celui des grands ensembles, a fait l’objet de nom­breuses cam­pagnes de com­mu­ni­ca­tion de la part des pou­voirs publics, ain­si que des opérateurs en charge de leur réalisation. La plu­part d’entre elles ont mis en avant l’idée d’un futur désirable, n’hésitant pas pour cela à mul­ti­plier les références à l’imagination col­lec­tive. Un demi-siècle plus tard, force est de consta­ter que la réalité a, de ce point de vue, lar­ge­ment dépassé la fiction.

En 1965, la mise en bal­lot­tage du général de Gaulle aux élections présidentielles ne consti­tue pas qu’un évènement poli­tique. Elle peut aus­si être interprétée comme le signe évident d’une aspi­ra­tion à un autre modèle de société porté par des hommes plus jeunes comme François Mit­ter­rand ou Jean Leca­nuet. Alors même que beau­coup de grands ensembles sont encore en cours de réalisation, de nom­breuses voix se font entendre pour réclamer un autre modèle sur le plan urba­nis­tique ; celui porté par le ministre de la Construc­tion depuis dix ans fait l’objet de nom­breuses cri­tiques. Notam­ment parce qu’il ne cor­res­pond pas aux aspi­ra­tions de nom­breuses familles qui se pro­jettent dans un futur incarné par un pavillon dont elles seraient les propriétaires. Le milieu des années 1960 est également marqué par les réflexions rela­tives à la civi­li­sa­tion urbaine et à ses res­sorts. De ce point de vue, le modèle de l’American way of life apparaît net­te­ment comme un futur urbain désirable, loin du modèle étatique des grands ensembles qui ren­voie aux années 1950. D’où la nécessité de chan­ger de para­digme urbain.

De ce point de vue, 1965 est marquée au cha­pitre des poli­tiques urbaines par l’adoption du schéma direc­teur d’aménagement et d’urbanisme de la région de Paris. Celui-ci marque, dans une cer­taine manière, une rup­ture avec les décennies précédentes en matière de pla­ni­fi­ca­tion dans la mesure où il valide expressément le prin­cipe de l’extension de la ban­lieue pari­sienne au mépris de la doc­trine édictée par Jean-François Gra­vier en 1947 dans son livre Paris et le désert français. Mais, sur­tout, il acte le prin­cipe de la création d’un nou­veau type de modèle urbain inti­tulé « villes nou­velles », qui s’imposera de fait sur l’ensemble du ter­ri­toire natio­nal : cinq créations de ce type sont prévues en région pari­sienne, et quatre en pro­vince. Ce qui consti­tue assurément une différence avec l’approche graviériste, c’est la volonté de faire des villes nou­velles de nou­velles centralités urbaines à part entière Dans les présentations des pro­jets, l’accent est mis sur une meilleure prise en compte des aspi­ra­tions des familles françaises en matière de loge­ment et de cadre de vie. Ce qui cor­res­pond d’ailleurs à un chan­ge­ment d’échelle plus général, comme en témoigne l’opération Vil­la­gex­po à Saint-Michel-sur-Orge, en 1966, qui valide de manière offi­cielle le chan­ge­ment d’orientation des pou­voirs publics en faveur du loge­ment de type pavillon­naire, réalisé pour l’essentiel par des pro­mo­teurs privés. Une rup­ture majeure avec le modèle du grand ensemble, d’essence étatiste et, pour l’essentiel, tourné vers le loge­ment col­lec­tif. Le mes­sage concer­nant le pro­jet des villes nou­velles est clair : elles ne seront pas des ban­lieues-dor­toirs, mais, au contraire, des centres urbains où il fait bon vivre. Ce qui implique une atten­tion toute particulière accordée au cadre de vie dont la thématique est en train de s’imposer dans le référentiel de l’action publique rela­tive à l’urbanisme.

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Thi­bault Tellier 

Place piétonne dans la ville nou­velle de Saint-Quen­tin-en-Yve­lines ( Yve­lines), années 1970. 

© Roger-Viol­let

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