Le charme sincère du petit tour
Parmi les territoires identifiés au titre d’une ou plusieurs dimensions ne figurent pas toutes les métropoles, ce qui est à la fois logique et rassurant.
Logique car il est évident que de nombreux autres territoires présentent des contextes, caractéristiques et identités porteurs « d’avenirs » au cœur d’une époque promise aux transitions qui s’annoncent de plus en plus comme des ruptures. De nombreux travaux d’observation et de recherche s’interrogent aujourd’hui sur le modèle métropolitain : n’est-il pas le lourd héritage du monde des énergies (fossiles) ? Est-il au contraire le référent du développement à venir, qui enjoint à produire l’urbain par le renouvellement, la ville là où elle est déjà constituée, le marché là où il est dynamique – c’est-à-dire à arroser là où c’est déjà mouillé, et par là même renoncer à toute vision ou politique de rééquilibrage ou émergence ?
Rassurant parce qu’il y a derrière la qualification — le terme même, globalisant, de métropole – des réalités très contrastées que confirme l’exercice et qu’il est de toute évidence nécessaire d’appréhender. Au-delà des poids de population, du rayonnement économique et de la connexion régionale, nationale et internationale qui distinguent et hiérarchisent les métropoles, il apparait de manière assez saisissante qu’une dimension longtemps méconnue se révèle aujourd’hui déterminante : celle de leur inscription territoriale, des relations avec leurs hinterlands et les autres métropoles.
Ainsi l’exercice distingue-t-il : une métropole polarisante mais positionnée de longue date dans un ensemble géographique plus vaste (Nancy et le sillon Lorrain) ; des métropoles – à l’inverse – diffuse, s’étendant sur un territoire régional étendu (le Nord Pas-de-Calais) ou clivées en leur sein (Aix et Marseille) ; et des métropoles associées rayonnant ensemble sur un très vaste territoire qui confirment le découpage régional de 2015 (l’armature Lyon – Clermont – Grenoble – Saint-Etienne et la région Auvergne – Rhône-Alpes) ou au contraire le contredisent (Nantes et Rennes, chacune dans une région).
Point commun entre les métropoles identifiées : elles rayonnent sur de vastes hinterlands à l’intérieur desquels apparaissent certains territoires d’équilibre, de développement associé ou alternatif : Sarrebourg, Valence, Cholet, Cavaillon et le réseau des agglomérations du Nord (Arras, Béthune, Valenciennes, Saint-Omer).
Ce sont des territoires du lointain métropolitain – en référence au terme développé par François Leclercq dans une tribune publiée en 2018 sur le site du Monde – ces espaces discrets poursuivant des trajectoires bien spécifiques, bénéficiant de toute évidence de la dynamique des métropoles auxquelles ils sont parfaitement connectés, sans avoir eu jusqu’ici trop à souffrir de leurs besoins contingents (traitement des déchets, production d’énergie etc) qui ont le plus souvent concerné des territoires plus proches.
Ces derniers ont pour caractéristiques communes d’être des territoires actifs et solides malgré des emplois à faible niveau de qualification (réputés délocalisables ou remplaçables par l’IA ou la robotisation) correspondant au profil des actifs locaux qui trouvent à s’y loger – et plus globalement à y vivre — dans de bonnes conditions.
Ici se préfigure semble-t-il l’avenir des métropoles (aux périmètres élargis) et de la France.
Julien Meyrignac