Pascal Waldschmidt, vice-président du Pays Beaume Drobie
Communauté de communes ardéchoise de 8 730 habitants, le Pays Beaume Drobie se découpe entre plaine, piémont et montagne. Territoire touristique et aride en été, il parie sur l’expérimentation pour s’adapter au réchauffement climatique.
En 2022, vous avez installé un réservoir d’eau enterré et empli de sable (Reeps) dans la commune de Beaumont, en Ardèche, dont vous avez été maire pendant plus de vingt ans. Quel a été l’élément déclencheur ?
Nous avons anticipé la menace d’un manque d’eau potable en période estivale dû au réchauffement climatique. Nous sommes une région très touristique et la population est multipliée par 4 à cette période. Plutôt que de prélever de nouvelles ressources dans la nature au moment où il y en a le moins, nous avons opté pour l’expérimentation avec ce système qui permet de stocker de l’eau potable pendant plusieurs mois.
Nous avons remplacé le sable par de la pouzzolane (roche basaltique poreuse) disponible localement, pour construire une nappe phréatique artificielle. Ce procédé est peu coûteux. Nous avons analysé l’eau, il n’y a aucune trace de bactérie après plusieurs mois de stockage, démontrant l’efficacité de cette technique.
L’été dernier, nous ne l’avons pas exploité, car la source principale qui alimente la commune est restée à son niveau habituel. Au vu des niveaux de pluie actuels, il est probable que nous l’utilisions cet été. Nous avions inscrit ce projet dans le contrat de transition écologique (CTE), ce qui nous a permis de bénéficier d’un financement du Département à hauteur de 30 % et de 20 % de la part de l’État.
Nous avons également eu une aide de 2 000 euros de la fondation Eau Neige et Glace. Cependant, nous n’avons pas reçu de subvention de la part de l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, ce qui est scandaleux puisque nous demandions 25 000 euros et que leur budget annuel est de 630 millions d’euros. Toutefois, elle devrait financer à l’avenir de nouveaux Reeps, si cela est inscrit dans le plan de gestion de la ressource en eau (PRGE).
Quelles sont les actions mises en place pour l’agriculture face au changement climatique ?
Nous avons été les premiers à expérimenter le programme 4 pour 1 000. Il s’agit d’une technique développée par des scientifiques qui démontre qu’une augmentation de 4 pour 1 000 en humus dans les sols permettrait d’absorber le surplus de carbone dans l’atmosphère. L’idée est d’incorporer au sol du carbone sous forme de déchets verts. Ce qui permet, en outre, d’améliorer la qualité des sols et leur capacité à retenir de l’eau : ils sont donc moins sensibles à la sécheresse.
Nous l’expérimentons depuis deux ou trois ans avec sept agriculteurs. L’évaluation se fera à long terme, mais nous observons déjà des effets positifs.
L’enjeu est de penser le développement en respectant l’environnement.
Quels sont les grands enjeux en termes d’aménagement et d’urbanisme d’un territoire fortement protégé ?
Nous avons adopté un plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) en 2020 qui respecte la procédure « zéro artificialisation nette » (ZAN). Nous avons également introduit plusieurs mesures en cohérence : l’interdiction de l’imperméabilisation des parkings ; l’obligation pour les maisons d’avoir une réserve d’eau pluviale d’1 m³ pour 10 m² de surface couverte ; une réserve d’eau préremplie pour les piscines individuelles en période estivale, afin de ne pas prélever dans les réserves d’eau ; enfin, les bâtiments commerciaux et industriels devront avoir un minimum de surface en photovoltaïque.
Dans une zone protégée telle que la nôtre, l’enjeu est de penser le développement en respectant l’environnement, la nature et le paysage.
Maider Darricau
Photo : Pascal Waldschmidt. © D. R.
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