Explorons nos futurs (heureux)

♦ 41e RENCONTRE DES AGENCES D’URBANISME ♦

 

Le réseau des agences d’urbanisme est doté d’un don d’ubiquité. Crise sani­taire oblige, Fran­çois Cuillandre accueille les par­ti­ci­pants depuis les locaux de l’Agence d’urbanisme Brest-Bre­tagne. Jean Rott­ner lui répond depuis Mulhouse.

« Cette crise agit comme un révé­la­teur des inter­dé­pen­dances, des fra­gi­li­tés, et des inéga­li­tés ter­ri­to­riales et sociales, quand elle ne les ampli­fie pas en tou­chant les plus pré­caires et les plus vul­né­rables », ana­lyse le maire de Brest. « La situa­tion peut être vécue comme por­teuse d’angoisse et conduire cer­tains à recher­cher des formes de pro­tec­tion dans le repli sur soi », pour­suit Fran­çois Cuillandre. Il rap­pelle que les res­pon­sables poli­tiques doivent por­ter un mes­sage renou­ve­lé de pro­grès, d’émancipation, de convi­via­li­té, de soli­da­ri­té et de res­pon­sa­bi­li­té éco­lo­gique et sociale. Dans cette approche, ajoute-t-il, « le point de vue du citoyen est incon­tour­nable, et l’échelle locale, la base de cet enjeu démo­cra­tique ».

Hori­zon 2040, éloi­gné et proche

C’est le para­doxe de cette 41e Ren­contre de por­ter sur la construc­tion d’un futur heu­reux en pleine crise. Il est aus­si de mobi­li­ser bien plus de par­ti­ci­pants (1 800 ins­crits) que lors des pré­cé­dentes édi­tions. « Le numé­rique per­met d’être inven­tifs », se réjouit Jean Rott­ner. Pen­dant la pré­pa­ra­tion, les orga­ni­sa­teurs ont été pris d’un doute : la thé­ma­tique « Explo­rons nos futurs (heu­reux) », choi­sie bien avant le mois de mars, devait-elle être adap­tée au contexte ? Il n’en a rien été. « Ce tra­vail pour ima­gi­ner des futurs pos­sibles nous rap­proche de la situa­tion que nous connais­sons », avance le pré­sident de la Fnau.

L’ho­ri­zon 2040 est à la fois éloi­gné et proche. C’est le temps de l’action, de la pros­pec­tive et du sens. C’est aus­si celui d’une Europe zéro car­bone en 2050. « Cette échéance accroît la pres­sion sur les élus, les agences et la socié­té, pour réflé­chir à une tra­jec­toire et rompre avec nos habi­tudes. » Jean Rott­ner refuse tout angé­lisme. « On nous pro­met un ave­nir sombre. Eh bien ! se pro­je­ter ensemble pen­dant deux jours, avoir ce temps de res­pi­ra­tion, c’est se mettre en capa­ci­té de pro­po­ser à nos conci­toyens des pers­pec­tives dans les­quelles le bon­heur fait par­tie des communs. »

Les solu­tions doivent venir de vos territoires 

La ministre Jac­que­line Gou­rault pro­longe cette idée : « Le thème de votre ren­contre signe le retour du temps long dans la pen­sée de l’aménagement du ter­ri­toire. Il replace le citoyen au cœur des réflexions en pri­vi­lé­giant l’idée de bon­heur sur celle de pro­grès, par­fois dés­in­car­née. » Elle appelle à bâtir un récit com­mun : « Lut­ter contre les frac­tures ter­ri­to­riales et favo­ri­ser par­tout les com­plé­men­ta­ri­tés entre ter­ri­toires, à toutes les échelles. » La ministre insiste : « Les solu­tions doivent venir de vos ter­ri­toires qui mènent de nom­breuses poli­tiques inno­vantes et volontaristes. »

À leurs côtés, l’État joue un rôle d’accompagnateur en fai­sant du sur-mesure, en favo­ri­sant la mobi­li­sa­tion de ses capa­ci­tés d’ingénierie autour de l’ANCT et de son réseau ter­ri­to­rial, rejoint par les agences d’urbanisme depuis la signa­ture d’une conven­tion avec la Fnau.

« Nous avons besoin des agences d’urbanisme pour accom­pa­gner les col­lec­ti­vi­tés. » Elle se réfère aux contrats de relance et de tran­si­tion éco­lo­gique, déployés en 2021, et aux pro­grammes natio­naux « Action cœur de ville », « Petites villes de demain », « Ter­ri­toires d’industrie » ou « Nou­veaux lieux, nou­veaux liens » (consa­cré aux tiers-lieux). Des pro­grammes accé­lé­rés par le plan de relance, avec notam­ment un mil­liard d’euros de dota­tion aux col­lec­ti­vi­tés pour la réno­va­tion ther­mique de leur centre-ville, le sou­tien aux com­merces, le déblo­cage de pro­jets urbains grâce au fonds pour le recy­clage des friches.

Elle évoque enfin une nou­velle étape de décen­tra­li­sa­tion : « Nos poli­tiques publiques doivent recon­naître la sin­gu­la­ri­té et l’inventivité de vos ter­ri­toires en vous don­nant des liber­tés et des res­pon­sa­bi­li­tés accrues. » Un pro­jet de loi orga­nique, adop­té par le Sénat, va ouvrir la voie à une expé­ri­men­ta­tion durable, puis le pro­jet de loi 3D (décen­tra­li­sa­tion, dif­fé­ren­cia­tion, décon­cen­tra­tion) pré­sen­té début 2021 four­ni­ra aux col­lec­ti­vi­tés les outils pour accé­lé­rer les tran­si­tions. Il sera com­plé­té d’un qua­trième D, pour décom­plexi­fi­ca­tion. Jac­que­line Gou­rault n’en oublie pas le thème de la ren­contre en repre­nant Nietzsche : « Que l’avenir et la chose la plus loin­taine soient la cause de ton aujourd’hui. »

 

Jean-Michel Mestres

 

Pho­to : Le télé­phé­rique de Brest © Mathieu Le Gall/Brest métropole

 

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