Représenter la ville et les territoires

Dessinons les défis

 

Les cartes et les plans ne sont que des repré­sen­ta­tions du monde, par nature par­tielles et sub­jec­tives. Par­tielles, car cer­taines carac­té­ris­tiques des ter­ri­toires, des villes, des éco­sys­tèmes et des socié­tés sont dif­fi­ci­le­ment repré­sen­tables, sinon irre­pré­sen­tables. Comme les don­nées d’ambiance, sen­sibles, qua­li­ta­tives, ou les enjeux com­plexes, du fait du nombre de para­mètres à inté­grer, de leurs carac­té­ris­tiques (dyna­miques, tem­po­ra­li­tés, etc.) et de leur hétérogénéité.
Sub­jec­tives, car ce sont des pro­jec­tions qui, à toutes les échelles, conver­tissent une sphère en plan, dépendent de la pré­ci­sion et de l’exhaustivité rela­tives des rele­vés, et sont assu­jet­ties aux conven­tions gra­phiques et aux inten­tions du cartographe.

L’avènement du digi­tal – de Google Maps à Géo­por­tail, en pas­sant par OpenS­treet­Map, des cartes en open source, des sys­tèmes d’information géo­gra­phique, des appli­ca­tions de géné­ra­tion de cartes, etc. – n’a pas fon­da­men­ta­le­ment remis en cause ce constat. Le numé­rique n’a que très mar­gi­na­le­ment aug­men­té nos capa­ci­tés cog­ni­tives à inté­grer des infor­ma­tions mul­ti­fac­to­rielles, et il demeure que repré­sen­ter, c’est choi­sir. Par néces­si­té ou par volon­té, sou­vent les deux : les cartes sont donc poli­tiques, ce sont des outils de gou­ver­nance des exé­cu­tifs et des admi­nis­tra­tions pour faire com­prendre (mobi­li­ser) et pour déci­der (agir).

La prise en compte des grands enjeux ter­ri­to­riaux et socié­taux de notre époque – les défis qu’imposent les grandes tran­si­tions éco­lo­giques et cli­ma­tiques, éco­no­miques et sociales – néces­site des repré­sen­ta­tions ori­gi­nales et « effi­caces », afin de garan­tir la bonne appré­hen­sion des enjeux par le plus grand nombre et leur prise en consi­dé­ra­tion effec­tive par les acteurs concernés.
Or, les cartes et les plans ne sont – de toute évi­dence – pas au ren­dez-vous. Car s’ils ont beau­coup pro­gres­sé du point de vue de la qua­li­té des repré­sen­ta­tions, ils semblent encore au ser­vice d’une concep­tion archaïque de la poli­tique : celle de l’information des­cen­dante, ser­vie par des data­vi­sua­li­sa­tions des­ti­nées à sou­te­nir des postures.
En consé­quence, les citoyens et les déci­deurs ont aujourd’hui besoin de pro­duire leurs propres docu­ments de réfé­rence de nature à objec­ti­ver les débats, par­ta­ger les constats et sou­te­nir un enga­ge­ment col­lec­tif. Ils ont besoin de coéla­bo­rer des cartes et des plans, sans les­quels, l’aménagement du ter­ri­toire et l’urbanisme, embour­bés dans des cadres pro­cé­du­raux deve­nus bien trop tech­niques, juri­diques, admi­nis­tra­tifs, ne vont pas pou­voir réa­li­ser leur mue vers la pla­ni­fi­ca­tion durable.

Pour que la socié­té s’engage à limi­ter les inci­dences sur les éco­sys­tèmes et réduire les inéga­li­tés ter­ri­to­riales, sociales, éco­no­miques, une grande par­ti­ci­pa­tion et adhé­sion popu­laire, démo­cra­tique, est néces­saire. La ques­tion des repré­sen­ta­tions y est cen­trale dans la mesure où des­si­ner des cartes et des plans est un exer­cice posi­ti­ve­ment mobi­li­sa­teur parce qu’il convoque des ima­gi­naires puis­sants. Il nous ramène aux his­toires de pirates, aux cours de géo­gra­phie, aux voyages… Il est le lieu et le moment de la ren­contre entre le monde et nos mondes, dont il est si urgent, désor­mais, de pro­duire des repré­sen­ta­tions uni­ver­sel­le­ment subjectives.

Julien Mey­ri­gnac

 

 

Pour ache­ter le numé­ro en ver­sion papier ou en ver­sion numérique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


À pro­pos

Depuis 1932, Urba­nisme est le creu­set d’une réflexion per­ma­nente et de dis­cus­sions fécondes sur les enjeux sociaux, cultu­rels, ter­ri­to­riaux de la pro­duc­tion urbaine. La revue a tra­ver­sé les époques en réaf­fir­mant constam­ment l’originalité de sa ligne édi­to­riale et la qua­li­té de ses conte­nus, par le dia­logue entre cher­cheurs, opé­ra­teurs et déci­deurs, avec des regards pluriels.


CONTACT

01 45 45 45 00


News­let­ter

Infor­ma­tions légales
Pour rece­voir nos news­let­ters. Confor­mé­ment à l’ar­ticle 27 de la loi du 6 jan­vier 1978 et du règle­ment (UE) 2016/679 du Par­le­ment euro­péen et du Conseil du 27 avril 2016, vous dis­po­sez d’un droit d’ac­cès, de rec­ti­fi­ca­tions et d’op­po­si­tion, en nous contac­tant. Pour toutes infor­ma­tions, vous pou­vez accé­der à la poli­tique de pro­tec­tion des don­nées.


Menus