Le polar SF d’animation Mars Express, qui sortira au cinéma en fin d’année*, se déroule sur une colonie martienne destinée à ceux qui souhaitent échapper à la densité et à la grisaille terrestre. Pour la revue Urbanisme, son réalisateur, Jérémie Périn, et son directeur artistique, Mikael Robert, dévoilent comment ils ont imaginé Noctis, une cité martienne où il fait bon vivre, libérée des contraintes de surpopulation, de pollution, de sobriété foncière, et de toute autre considération quelque peu Terre à Terre.
Quitter la Terre
Jérémie Périn : « Le début du film commence sur Terre, dans une mégapole ultra-verticale, empilée, conforme à une représentation cyberpunk et dystopique du futur. Nos deux héros, des détectives privés, doivent se rendre sur Mars pour les besoins de leur enquête. Pour cela, ils se rendent dans un spatioport, d’où décollent des avions qui viennent s’arrimer à un vaisseau géant, le Mars Express, qui va les emmener en quelques jours jusqu’à la planète rouge. On ne précise d ’ailleurs pas combien de temps dure la traversée : même les scientifiques que nous avons consultés nous ont dit que cela n’importait pas pour les besoins de notre histoire ! En tout cas, le voyage est généralement fait par des personnes aisées, car il coûte cher. »
Mikael Robert : « Il y a des vaisseaux pour les touristes, les voyageurs d ’affaires, les migrants, ou les seniors qui vont passer leur retraite sur Mars. Et il y a aussi des vaisseaux de fret pour le transport de marchandises. »
Jérémie Périn : « L’occasion de dire que la ville sur Mars, dirigée par des méga-corporations, s’est beaucoup construite par le pillage de ressources terrestres. »
Life on Mars
Jérémie Périn : « La ville de Noctis se situe dans la région de Noctis Labyrinthus, qui est le véritable nom scientifique de cette zone martienne. Elle est édifiée au fond d ’un gigantesque canyon qui balafre la surface de la planète. Cela a permis de poser un plafond de verre, comme un couvercle au-dessus de la cité, soutenu par des piliers géants. Ce plafond est truffé d’écrans de réalité augmentée permettant de rendre le ciel plus bleu qu’il ne l’est en réalité. Car sur Mars, la lumière est en fait deux fois plus faible que sur Terre. Contrairement à la ville terrienne, très verticale, Noctis est très horizontale. D’autant plus que le plafond ne permet pas de construire d ’immeubles trop hauts. Donc on s’étale : il y a des lotissements, des champs, des fermes hydroponiques, des espaces verts, des plages, des canaux… L’aspect visuel de la ville est conçu pour être rassurant pour ses habitants, pour leur donner l’impression qu’ils sont davantage sur Terre que sur Terre. »
Mikael Robert : « Au niveau architectural, il y a un côté californien, des réminiscences Art déco, des bâtiments plus brutalistes… Je ne voulais pas d’une architecture trop homogène, comme conçue par une seule personne. On peut voir dans Noctis des immeubles datant de périodes différentes de l’histoire de la ville. Par ailleurs, certains choix sont dictés aussi pour la facilité de mise en scène. Le fait d’avoir une rue principale, une Main Street à l’américaine, permet de voir les personnages filer d’un bout à l’autre de la ville de façon très dynamique et très lisible. Et c’est, après tout, une ville moderne, récente, en quadrillage, contrairement aux vieilles villes européennes. »
*La date de sortie reste à déterminer
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Propos recueillis par Rodolphe Casso
© Phonogrammes extraits du film Mars Express