« S’il est toujours nécessaire de parler de la ville pour les gens, il est surtout urgent de la faire ! »

En 2000, l’architecte Helle Søholt a cofondé avec Jan Gehl la société danoise de conseil et conception en urbanisme du même nom, qu’elle dirige depuis une dizaine d’années. Basée à Copenhague, Gehl bénéficie d’une renommée internationale sur les stratégies de reconquête, transition et résilience des villes, pour une plus grande équité sociale et un moindre impact environnemental.

Com­ment avez-vous ren­contré Jan Gehl ? Vous n’aviez que 20 ans à l’époque : quelles étaient vos inten­tions res­pec­tives et mutuelles en créant une société ensemble ?

J’ai ren­contré Jan Gehl alors que j’étudiais l’architecture. J’ai com­mencé mon par­cours, en 1991, par l’architecture, puis, en troisième année, je me suis orientée vers l’urbanisme. C’est à ce moment-là que j’ai ren­contré Jan, qui était pro­fes­seur et direc­teur de l’Institut d’urbanisme et du département de desi­gn urbain de l’école d’architecture de Copen­hague [qui fait par­tie de l’Académie royale des beaux-arts, ndlr]. Il n’était pas mon pro­fes­seur, mais le département était très influencé par la phi­lo­so­phie de Jan, ses réflexions et sa méthodologie. Jan dis­po­sait de très nom­breux contacts inter­na­tio­naux et, grâce à lui, nous bénéficiions de mas­ter class de mer­veilleux pro­fes­seurs du monde entier.

Quand j’ai ter­miné mes études, Jan m’a pro­posé de tra­vailler avec lui ; je crois bien que j’étais la première employée qu’il n’ait jamais eue ! C’était en 1998, et nous avons com­mencé à tra­vailler sur différents pro­jets avant que je ne parte pour­suivre mes études aux États-Unis [Helle Søholt a obte­nu un mas­ter en archi­tec­ture à l’université de Washing­ton, à Seat­tle, en 1999]. Quand je suis reve­nue, en 2000, il m’a pro­posé de créer une société ensemble. J’avais 28 ans et Jan en avait 64 ; cela s’est révélé rapi­de­ment une col­la­bo­ra­tion très intéressante, parce que Jan était dans une phase « tar­dive » de sa carrière uni­ver­si­taire et il avait ce grand besoin de mettre en pra­tique ses ensei­gne­ments. Il avait été ensei­gnant par voca­tion et avec cœur, un ensei­gnant très actif, cher­cheur, auteur de plu­sieurs ouvrages, et il avait enseigné à l’étranger.

J’étais jeune, mais je dis­po­sais d’une cer­taine expérience de tra­vail dans diverses entre­prises pen­dant mes études. L’idée était que Jan conti­nue­rait à ensei­gner à l’école d’architecture à mi-temps, et que nous développerions ensemble une approche de l’urbanisme qui nous sem­blait faire cruel­le­ment défaut dans la pra­tique, plus centrée sur la dimen­sion humaine de la pla­ni­fi­ca­tion. Car, à l’époque, toutes les réflexions étaient orientées sur les tech­niques archi­tec­tu­rales des bâtiments et les systèmes de transport

Ain­si est née la pro­messe de l’agence Gehl « Cities for People ». Est-ce que ce concept, très simple en appa­rence, ne s’est pas révélé dif­fi­cile à par­ta­ger ? Je vous pose cette ques­tion parce que j’ai noté que le titre du livre de Jan Gehl, Des villes pour tous, a été tra­duit pour son édition française par : Pour des villes à échelle humaine, ce qui ne recouvre qu’une par­tie de votre approche, n’est-ce pas ?

Abso­lu­ment, votre remarque est très intéressante. Le développement de notre approche et de nos activités a connu deux phases. Au cours des dix premières années durant les­quelles nous avons dirigé ensemble l’entreprise avec Jan, notre objec­tif était d’affirmer la nécessité de créer des villes pour les gens, de pro­vo­quer un chan­ge­ment de para­digme dans la pla­ni­fi­ca­tion à l’échelle mon­diale. Nous pour­sui­vions un objec­tif presque phi­lan­thro­pique. Notre acti­vité consis­tait prin­ci­pa­le­ment en de l’enseignement et des conférences. Nous avons orga­nisé de nom­breuses mas­ter class à Copen­hague, aux­quelles nous invi­tions de nom­breuses villes, leurs élus et leurs admi­nis­tra­tions. Et nous nous sommes beau­coup appliqués à développer notre exper­tise sur la vie publique et les espaces publics. Dans une concep­tion mili­tante, car nous vou­lions affir­mer un droit fon­da­men­tal : les gens doivent avoir accès à des espaces publics ouverts, fonc­tion­nels, confor­tables, res­pec­tueux de la culture locale, qui sou­tiennent les communautés en leur offrant des opportunités, et qui per­mettent aux gens de vivre dans un mode de vie durable.

Pro­pos recueillis par Julien Meyrignac. 

© Gehl

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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